Le bupropion dans l’arrêt du tabagisme

Le bupropion (amfébutamone, ZYBAN) est disponible en Belgique depuis septembre 2000 comme aide à l’arrêt du tabagisme [voir Folia d’ octobre 2000 et juin 2001 concernant les effets indésirables]. Pendant l’année 2001, la sécurité d’emploi du bupropion a suscité des inquiétudes, suite à un certain nombre de notifications d’effets indésirables graves, dont certains avec issue fatale. De nombreuses notifications provenaient du Royaume-Uni, et la Medicines Control Agency , l’autorité compétente en la matière dans ce pays, a publié récemment (8 avril 2002) un état de la question [via http://www.mca.gov.uk ]. Le Centre de Pharmacovigilance au Royaume-Uni avait reçu alors 58 rapports de suspicion d’effets indésirables avec issue fatale. Il s’agissait surtout d’infarctus du myocarde et d’accidents cérébro-vasculaires. Bien qu’un lien causal avec le bupropion ne puisse être exclu, le décès peut être expliqué dans la plupart des cas par la pathologie sous-jacente (par ex. maladie cardio-vasculaire).

Le Centre de Pharmacovigilance britannique a également reçu notification de plusieurs cas de convulsions pour lesquels un lien avec le bupropion a été suspecté; dans la moitié de ceux-ci environ, il existait des antécédents de convulsions ou des facteurs de risque avant l’apparition des convulsions. Le Centre Belge de Pharmacovigilance a également reçu de telles notifications [voir Folia de juin 2001 ]. La Medicines Control Agency rappelle ainsi les contre-indications du bupropion: épilepsie, boulimie ou anorexie (ou antécédents de ces affections), présence d’une tumeur cérébrale, et sevrage brusque d’alcool ou de benzodiazépines. Il est aussi préférable de ne pas prescrire le bupropion en présence de facteurs de risque, notamment traitement par d’autres médicaments qui diminuent le seuil épileptogène (p. ex. autres antidépresseurs, neuroleptiques, théophylline, tramadol, quinolones), alcoolisme; la dose de bupropion chez ces patients ne peut en aucun cas dépasser 150 mg par jour.

On peut se demander si d’autres antidépresseurs peuvent également être utilisés comme aide à l’arrêt du tabagisme. Du point de vue pharmacologique, on peut classer en effet le bupropion parmi les antidépresseurs: aux Etats-Unis, il est accepté depuis 1985 pour le traitement de la dépression. La Cochrane Collaboration a réalisé une analyse des études randomisées disponibles avec des antidépresseurs (bupropion, nortriptyline, fluoxétine, moclobémide, sertraline, venlafaxine) comme aide à l’arrêt du tabagisme. Un effet favorable ne paraît se manifester qu’avec la nortriptyline (dans deux études jusqu’à 75 mg p.j., dans une troisième étude jusqu’à 100 mg p.j.) et le bupropion [Hughes et al.: Antidepressants for smoking cessation (Cochrane Review). In: The Cochrane Library, issue 1, 2002. Oxford: Update software]. Néanmoins, les chercheurs concluent qu’il n’est pas clairement établi que ces effets soient spécifiques à ces deux médicaments ou qu’ils puissent également se manifester avec d’autres antidépresseurs.