Traitement des aphtes idiopathiques récidivants


Abstract

Les aphtes idiopathiques récidivants disparaissent spontanément en 1 à 2 semaines. Un traitement n’est donc pas nécessaire en soi, et est surtout indiqué en cas d’aphtes fréquents et gênants. Un traitement local à base de lidocaïne (de préférence en solution visqueuse), de chlorhexidine ou d’acétonide de triamcinolone (pâte gingivale à 0,1%) peut être proposé, mais les preuves d’une efficacité sont limitées, et des effets indésirables ne peuvent être exclus. Un traitement par voie systémique n’est indiqué qu’exceptionnellement.

Les aphtes, c.-à-d. des ulcérations uniques ou multiples, douloureuses et récidivantes de la muqueuse buccale non kératinisée, surviennent le plus souvent déjà dans l’enfance, et leur incidence diminue à partir de l’âge de 50 ans. Les aphtes sont généralement de petite taille, avec un diamètre de 4 à 8 mm (forme mineure), mais il existe aussi des aphtes d’un diamètre de 1 cm ou plus (forme majeure).

Dans la plupart des cas, aucune étiologie n’est retrouvée. Dans les formes graves d’apparition soudaine, il est toutefois utile d’exclure le rôle d’affections systémiques (p. ex. syndrome de Behçet, affections inflammatoires de l’intestin, maladie coeliaque, infections virales p. ex. par le VIH ou l’herpès), ou de médicaments (surtout les AINS, les β-bloquants, l’alendronate). Certains patients souffrant d’aphtes récidivants présentent une carence en fer, en vitamine B ou en acide folique, mais il n’est pas prouvé que l’apport de suppléments en vitamines ou en fer accélèrent la guérison, et il n’est pas recommandé de déterminer systématiquement les taux d’acide folique, de vitamine B12 et de ferritine.

Les aphtes idiopathiques récidivants disparaissent spontanément en 1 à 2 semaines, et un traitement n’est donc pas nécessaire en soi. Il est généralement conseillé d’éviter les traumatismes (p. ex. en utilisant une brosse à dent trop dure ou en mangeant des aliments durs et piquants) ainsi que les aliments et les boissons acides. Un traitement est surtout indiqué en cas d’aphtes fréquents et gênants. Pour les traitements locaux suivants, il existe des preuves limitées de leur efficacité.

  • Les préparations locales à base d’anesthésiques locaux (p. ex. la lidocaïne) peuvent atténuer la douleur. Des picotements ou une réaction allergique surviennent rarement. Lorsque les anesthésiques locaux sont appliqués de façon étendue, il existe un risque de fausse route aussi longtemps que persiste l’insensibilité de la muqueuse buccale et de la gorge; une intoxication à la lidocaïne peut survenir par résorption au niveau de la muqueuse endommagée ou par déglutition. Afin de maintenir l’effet le plus local possible, on opte de préférence pour une préparation visqueuse de lidocaïne.
  • Les préparations locales à base de chlorhexidine empêchent une contamination secondaire de la lésion. La chlorhexidine peut entraîner une coloration brunâtre des dents; celle-ci peut parfois être évitée par le brossage des dents avant le rinçage de la bouche.
  • Les préparations locales à base d’un corticostéroïde (p. ex. l’acétonide de triamcinolone à 0,1 % sous forme de pâte gingivale) pourrait, d’après certains, atténuer la douleur et accélérer la guérison. Une candidose orale peut apparaître, et une résorption du corticostéroïde par la muqueuse endommagée est possible.

Chez les patients présentant des aphtes graves récidivants, l’utilisation de corticostéroïdes par voie systémique semble être une option thérapeutique, mais il n’est pas prouvé qu’elle soit plus efficace que l’application locale de corticostéroïdes, et le risque d’effets indésirables est plus grand. Il existe également des données sur l’efficacité de la thalidomide (p. ex. chez des patients infectés par le VIH) mais son usage est très limité vu sa tératogénicité et ses autres effets indésirables.


Note

  • Pour les spécialités suivantes à base de chlorhexidine et/ou de lidocaïne, l’usage en cas d’aphtes est mentionné comme indication dans la notice.
    • Lidocaïne solution visqueuse: Xylocaïne Visqueuse®
    • Chlorhexidine: Baxil® (spray), Eludril® (solution), Corsodyl® (gel, solution, spray)
    • Chlorhexidine+lidocaïne: Medica® (spray).

    Dans le Répertoire Commenté des Médicaments au chapitre ' 12.4.4. Bains de bouche, collutoires et gargarismes ' , d’autres spécialités qui, selon la notice, peuvent être utilisées en cas d’aphtes sont également mentionnées. Elles contiennent le plus souvent des antiseptiques et/ou des analgésiques. Nous n’avons retrouvé aucune donnée concernant leur efficacité.

  • L’acétonide de triamcinolone à 0,1 % (Kenacort A®, pâte gingivale) a comme indication dans la notice le traitement symptomatique de lésions inflammatoires aiguës de la muqueuse buccale.

Quelques références

  • Farmacotherapeutisch Kompas, via http://www.fk.cvz.nl/
  • Orter S. et Scully C.: Aphtous ulcers (recurrent) in Clinical Evidence 2005; 14: 1678-84
  • Scully C.: Aphtous ulceration. N Engl J Med 2006; 355: 165-72