Traitement symptomatique de la gonarthrose en première ligne


Abstract

Bon nombre de personnes âgées souffrent de gonarthrose (ostéoarthrite ou arthrose du genou) pour laquelle un traitement médicamenteux peut s’avérer nécessaire. Sur base des recommandations émises récemment par The National Institute for Heath and Clinical Excellence (NICE) [Clinical guideline 59 (February 2008) via www.nice.org.uk ] et de deux études publiées récemment dans le Brit Med J [2008; 336: 138-42 ], cet article discute de la prise en charge de la gonarthrose en première ligne.


Recommandations de NICE

Selon les recommandations de NICE, la prise en charge de l’ostéoarthrite repose avant tout sur des mesures générales (telles que de l’exercice physique, une perte de poids en cas de surcharge pondérale). Lorsque la douleur reste trop gênante, il peut être utile de recourir à un traitement médicamenteux en commençant de préférence par le paracétamol ou, lorsqu’il s’agit d’arthrose des genoux ou des mains, par un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) à usage local. Lors de l’utilisation d’un AINS par voie orale, NICE recommande de prendre concomitamment un inhibiteur de la pompe à protons. On y souligne aussi l’importance de prendre en considération la préférence et les besoins du patient lors du choix du traitement.


Efficacité des AINS par voie locale versus par voie orale

Une étude randomisée contrôlée a comparé un traitement par l’ibuprofène par voie orale (1,2 g p.j.) et par voie locale (sous forme d’un gel; 1,5 g p.j.) chez des patients de plus de 50 ans souffrant de gonarthrose. Les résultats après 12 mois n’ont pas montré de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne l’effet sur la douleur au niveau du genou (évaluée sur base du Womac global score) et l’apparition d’effets indésirables graves. Dans cette étude, un plus grand nombre de patients traités par voie orale a toutefois arrêté le traitement en raison d’effets indésirables, et un plus grand nombre de patients traités par voie locale a arrêté le traitement en raison d’un manque d’efficacité. Sur base de ces résultats, les auteurs concluent que les AINS par voie locale peuvent être une alternative utile aux AINS par voie orale chez des patients souffrant de gonarthrose. Les résultats de cette étude ne permettent pas de comparer l’ibuprofène au paracétamol, à un placebo ou à l’absence de traitement. On ne dispose pas de données comparables avec d’autres AINS.


Facteurs influençant le choix des patients

Dans ce même article du British Medical Journal sont également rapportés les résultats d’une étude de préférence dans laquelle les patients utilisaient la voie d’administration qu’ils préféraient. Dans cette étude, la majorité des patients ont opté pour un traitement par voie locale. Une analyse qualitative des données indique que le choix entre la préparation orale et la préparation locale était influencé par des facteurs tels que la nature de la douleur, ses localisations multiples, l’existence d’une affection concomitante, la perception du risque d’effets indésirables, les aspects pratiques, ainsi que le conseil médical reçu. Ainsi, les patients souffrant de douleurs modérées ou passagères, et les patients plus informés de la toxicité des AINS ont généralement opté pour un traitement par voie locale, tandis que les patients souffrant de douleurs sévères, constantes ou étendues ont plutôt opté pour un traitement par voie orale. Il est également apparu que les effets indésirables consécutifs à la prise orale d’ibuprofène étaient moins fréquents chez les patients ayant eux-mêmes choisi la voie orale que chez les patients traités par l’ibuprofène par voie orale de façon randomisée.

Les auteurs concluent que l’implication des patients dans le choix de leur traitement permet d’améliorer l’observance et l’efficacité du traitement, et de réduire le risque d’intolérance.


Commentaire

Comme le souligne un commentaire paru dans Minerva [2008; 7: 78-9] , ces études présentent toutefois un certain nombre de problèmes méthodologiques. En effet, elles ont inclus des patients relativement jeunes (âge moyen de 63 à 66 ans) et les patients qui présentaient des facteurs de risque de complications dues aux AINS (p. ex. antécédents d’effets indésirables avec des AINS) étaient exclus, alors que l’intérêt éventuel des AINS par voie locale par rapport aux AINS par voie orale devrait justement être évalué chez ces patients à risque. L’intérêt des AINS dans la prise en charge de la gonarthrose, certainement comme traitement de fond de la douleur, reste limité, et en l’absence de preuves d’une plus grande efficacité, la préférence doit dès lors être donnée à des médicaments avec moins d’effets indésirables, tels que le paracétamol.