Traitement de l’infection par H. pylori


Abstract

L’éradication d’H. pylori présente clairement des avantages en cas d’ulcère gastroduodénal non lié à la prise d’AINS et en cas de lymphome de MALT gastrique de bas grade. Les données concernant d’autres indications telles que l’ulcère lié à la prise d’AINS, la prévention du cancer gastrique, des troubles gastriques tels le pyrosis et la dyspepsie sont plus faibles ou moins univoques, et il n’existe pas toujours de consensus quant à la nécessité d’une telle éradication.

Avant d’instaurer un traitement d’éradication, il convient toujours de vérifier la présence d’H. pylori. Un schéma d’éradication à base (1) d’un inhibiteur de la pompe à protons, (2) de clarithromycine et (3) soit d’amoxicilline, soit de métronidazole reste actuellement le premier choix. La durée optimale du traitement fait toujours l’objet de discussions, et celle-ci varie selon les recommandations entre 7 et 14 jours. Pour poser le diagnostic d’infection par H. pylori et pour vérifier le succès de l’éradication (au plus tôt 4 semaines après le traitement), la préférence est donnée à des tests non invasifs, en particulier le test respiratoire à l’urée.

Cet article fait le point sur les indications de l’éradication d’Helicobacter pylori (H. pylori), et sur les schémas thérapeutiques proposés. Avant d’instaurer un traitement d’éradication, il convient toujours de vérifier la présence d’H. pylori. Après éradication, une nouvelle infection ne survient que rarement.


Indications évidentes de l’éradication

Ulcère gastro-duodénal non lié à la prise d’AINS. L’éradication d’H. pylori constitue la base du traitement de l’ulcère gastro-duodénal. Il est démontré qu’une telle éradication accélère la guérison (on dispose surtout de données pour l’ulcère duodénal) et diminue le risque d’hémorragies et de récidives. Un traitement d’entretien par un inhibiteur de la sécrétion acide gastrique peut ainsi être évité.

Lymphome de MALT gastrique de bas grade. L’éradication est recommandée chez les patients atteints d’un lymphome de MALT (mucosa-associated lymphoid tissue) gastrique de bas grade. Il ressort d’études d’observation que l’éradication d’H. pylori a un effet favorable sur la régression tumorale chez 60 à 90% des patients traités, ce qui permet d’éviter ou de postposer un traitement chirurgical, par radiothérapie ou par chimiothérapie.


Indications moins évidentes de l’éradication

Dans les indications qui suivent, les preuves sont plus faibles ou moins univoques, et il n’existe pas toujours de consensus quant à la nécessité d’une telle éradication.

Ulcères liés à la prise d’AINS.

  • Chez les patients ayant développé un ulcère gastro-duodénal lors de l’utilisation chronique d’AINS, l’éradication d’H. pylori (en association à un inhibiteur de la pompe à protons) n’a pas été supérieure en termes de guérison à un traitement par un inhibiteur de la pompe à protons seul.
  • En prévention d’un ulcère chez des patients sans antécédents d’ulcère gastro-duodénal qui débutent un traitement par un AINS et qui sont porteurs d’H.pylori, l’éradication est probablement aussi efficace que l’administration prophylactique d’un inhibiteur de la pompe à protons; il n’est pas prouvé de manière univoque si cela se vérifie aussi chez les patients avec des antécédents d’ulcère gastro-duodénal.

Prévention du cancer gastrique. Des études d’observation indiquent un lien entre une infection par H. pylori et un cancer gastrique. Des données suggèrent que l’éradication d’H. pylori pourrait avoir un effet favorable sur la régression des lésions chez les patients ayant un risque élevé de cancer gastrique (atrophie de la muqueuse gastrique, métaplasie intestinale). Dans une étude randomisée ouverte récente, l’éradication d’H. pylori a diminué le risque de récidives chez les patients chez lesquels une tumeur gastrique à un stade précoce avait été récemment réséquée par endoscopie. [N.d.l.r.: selon certains experts, l’éradication d’H. pylori est également justifiée après une gastrectomie partielle, afin de diminuer le risque de récidives au niveau de l’estomac, et il est également utile de dépister et d’éradiquer l’H.pylori chez les proches (enfants, frères et soeurs) de patients atteints d’un cancer gastrique.]

Troubles gastriques (entre autres pyrosis, dyspepsie fonctionnelle) [voir aussi Fiche de transparence "Prise en charge des troubles gastriques", annexée aux Folia de février 2009]. Chez les patients sans signes d’alarme (c.-à-d. sans dysphagie, perte de poids, jaunisse, anémie ou masse épigastrique), l’éradication d’H. pylori est une option thérapeutique, à côté d’un traitement empirique par un inhibiteur de la pompe à protons ou par un antihistaminique H2, ou d’un traitement établi sur base des résultats de l’endoscopie. Les différentes options sont probablement équivalentes. Bon nombre de patients (jusqu’à 3 patients sur 4) présentent toutefois encore des symptômes après un an.


Schéma thérapeutique

Le Répertoire Commenté des Médicaments (édition 2008, non modifié dans l’édition 2009 qui paraîtra en avril) reprend le schéma suivant.

Deux fois par jour pendant 7 à 10 jours:

  • un inhibiteur de la pompe à protons (ésoméprazole 20 mg, lansoprazole 30 mg, oméprazole 20 mg, pantoprazole 40 mg ou rabéprazole 20 mg) avant les repas
  • amoxicilline 1 g ou métronidazole 500 mg
  • clarithromycine 500 mg.

Ce schéma thérapeutique est encore toujours considéré comme le premier choix dans les sources que nous avons consultées.

La mauvaise observance du traitement et la résistance d’H. pylori aux antibiotiques, notamment à la clarithromycine, sont les principaux facteurs prédictifs de l’échec du traitement. Dans les régions où le taux de résistance à la clarithromycine est égal à 15 à 20 % ou plus, et en cas d’échec d’un schéma antérieur à base de clarithromycine, il est préférable de ne pas utiliser le schéma à base de clarithromycine [n.d.l.r.: la prévalence de la résistance à la clarithromycine en Belgique s’élève de 11 à 18 %. Vu la provenance des données et les biais de sélection possibles, cette prévalence est probablement légèrement surestimée].

Des tests de sensibilité sont recommandés après échec de deux traitements empiriques.

Le traitement par un inhibiteur de la sécrétion gastrique (inhibiteur de la pompe à protons ou antihistaminique H2) ne doit être poursuivi au-delà des 7 à 10 jours classiquement recommandés qu’en présence d’un ulcère étendu ou de complications, telles une hémorragie ou une perforation.

Les schémas alternatifs proposés sont les suivants.

  • Inhibiteur de la pompe à protons + amoxicilline + métronidazole (pour les doses, voir ci-dessus).
  • Inhibiteur de la pompe à protons (voir dose ci-dessus) + métronidazole (500 mg 3 x p.j.) + tétracycline (500 mg 4 x p.j.) + sous-citrate de bismuth (120 mg 4 x p.j.). Le sous-citrate de bismuth n’est pas disponible en Belgique, le sous-gallate de bismuth et le sous-gallate de nitrate sont disponibles en magistrale.

Durée du traitement

La durée optimale du traitement d’éradication fait toujours l’objet de discussions. Initialement, une durée de traitement de 7 jours avait été proposée, mais certaines directives recommandent à présent une durée de traitement standard de 14 jours. Il ressort cependant d’une méta-analyse d’études randomisées contrôlées que le fait de prolonger la durée du traitement n’augmente le pourcentage d’éradication que de façon limitée: de 77 à 81 % (7 jours versus 10 jours), et de 73 à 78 % (7 jours versus 14 jours). Cette augmentation n’a été constatée que pour le schéma à base d’amoxicilline, pas pour le schéma à base de métronidazole. Elle était plus marquée en cas d’éradication faisant suite à une dyspepsie sans ulcère, plutôt qu’après une éradication faisant suite à un ulcère gastro-duodénal.


Etudes récentes sur le traitement séquentiel

Des schémas thérapeutiques séquentiels ont été proposés ces dernières années: un inhibiteur de la pompe à protons + amoxicilline pendant 5 jours, suivi d’un inhibiteur de la pompe à protons + clarithromycine + métronidazole pendant à nouveau 5 jours. Des résultats satisfaisants seraient obtenus avec ce schéma, même en cas de résistance à la clarithromycine. Les données sur le traitement séquentiel proviennent pincipalement d’Italie, et doivent être validées ailleurs avant de donner lieu à des recommandations systématiques.


Diagnostic de l’infection par H. pylori et suivi après le traitement

En ce qui concerne le diagnostic de l’infection par H. pylori et la vérification de son éradication après le traitement, la préférence est donnée à des tests non invasifs. Le test respiratoire à l’urée constitue ici le premier choix. La recherche de l’antigène d’H. pylori dans les fèces, ainsi que les tests sérologiques sont des alternatives possibles, mais elles sont toutefois moins précises que le test respiratoire à l’urée. Les tests invasifs impliquant la réalisation de biopsies lors de l’examen endoscopique ne sont utilisés que lorsqu’une endoscopie est quand même effectuée pour d’autres raisons.

Pour que les résultats des tests (invasifs ou non invasifs) soient fiables, il est important que le patient n’ait pas pris d’antibiotiques pendant le mois précédent, ni d’inhibiteurs de la pompe à protons pendant au moins 1 semaine et de préférence 2 semaines.

Le succès de l’éradication doit être vérifié au plus tôt 4 semaines après le traitement [n.d.l.r.: selon certains seulement après seulement 6 semaines].


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