Pharmacovigilance: intoxication par la colchicine par interaction avec des inhibiteurs du CYP3A4 ou de la glycoprotéine P

La colchicine (Colchicine Opocalcium®) est utilisée dans la crise de goutte. Alors que ce médicament est disponible chez nous depuis longtemps, il vient seulement d’être enregistré comme " médicament " et commercialisé aux Etats-Unis. Lors de l’évaluation du dossier d’enregistrement, la Food and Drug Administration (FDA) des Etats-Unis a examiné les données disponibles en ce qui concerne les effets indésirables et les interactions de la colchicine.

Plusieurs cas d’intoxication par la colchicine (parfois d’évolution fatale) ont été rapportés suite à la prise concomitante de colchicine à dose thérapeutique et d’inhibiteurs du CYP3A4 ou de la glycoprotéine P (P-gp): surtout des macrolides (entre autres la clarithromycine et l’érythromycine) et des antimycosiques (entre autres l’itraconazole et le kétoconazole), mais aussi la ciclosporine, des antagonistes du calcium (le diltiazem et le vérapamil), ainsi que le jus de pamplemousse (pour la liste des inhibiteurs du CYP3A4, voir Répertoire p. 37; en ce qui concerne la P-gp, voir Répertoire p. 8).

Le risque d’interactions à l’origine d’effets indésirables graves est surtout élevé chez les patients atteints d’une insuffisance rénale ou hépatique. Les symptômes d’une intoxication par la colchicine peuvent être: des troubles gastro-intestinaux (entre autres une diarrhée sévère), une myopathie (douleur ou faiblesse musculaire, pouvant éventuellement aller jusqu’à une rhabdomyolyse), une neuropathie, une dépression médullaire, une atteinte rénale ou hépatique. Des cas de myopathie et de rhabdomyolyse ont aussi été rapportés chez des patients sous colchicine qui étaient traités simultanément par une statine ou par le fénofibrate (ce qui peut s’expliquer par un effet synergique) ou par la digoxine (la digoxine est, comme la colchicine, un substrat pour la P-gp, ce qui peut être une explication). Sur base de ces données, la FDA recommande, chez les patients insuffisants rénaux ou hépatiques, d’éviter l’utilisation concomitante de colchicine et d’un inhibiteur puissant du CYP3A4 (les inhibiteurs les plus puissants sont indiqués en gras dans le tableau du Répertoire p. 37) ou d’un inhibiteur de la P-gp; chez les patients ayant une fonction rénale et hépatique normale, il convient, selon la FDA, d’envisager de diminuer la dose de colchicine ou d’interrompre le traitement si un traitement par un inhibiteur puissant du CYP3A4 ou par un inhibiteur de la P-gp s’avère indispensable [plus d’informations via www.fda.gov/Drugs (mot-clécolchicine; communiqué du 30/07/09)]. Vu les effets indésirables et les interactions de la colchicine, il est généralement préférable, d’opter en cas de crise de goutte pour un AINS ou la prednisolone (35 mg une fois par jour).