Fiches de transparence: mise à jour


Prise en charge de la goutte

  • Suite à des rapports récurrents concernant de graves réactions d’hypersensibilité cutanées (tel le syndrome de Stevens-Johnson) liées à l’allopurinol, l’Agence française de pharmacovigilance (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, ANSM) a mené une analyse rétrospective des données ayant été rassemblées entre 2008 et 2010. Il a dès lors été possible de mettre en évidence que ce type de réactions survenait surtout durant les deux premiers mois de traitement. L’incidence s’élevait à 1 sur 2.000 nouveaux patients. Dans 60 % des cas, cette réaction grave aurait pu être évitée en prenant les précautions suivantes:
    • ne pas instaurer de traitement chez les patients présentant une hyperuricémie asymptomatique;
    • toujours augmenter la dose de manière progressive, même chez les patients sans insuffisance rénale;
    • informer le patient sur la possibilité de réactions cutanées sévères et la nécessité d’interrompre immédiatement le traitement en cas d’apparition d’éruptions cutanées ou d’autres manifestations d’hypersensibilité1.
  • En Belgique, le fébuxostat peut être remboursé en cas d’intolérance sévère ou de contreindication à l’allopurinol. On ne dispose pas d’études spécifiques chez ce type de patients. Depuis la commercialisation du fébuxostat, de graves réactions d’hypersensibilité, tels le syndrome de Stevens- Johnson et un choc anaphylactique, ont été rapportées. On estime que l’incidence se situe entre 1 sur 1.000 et 1 sur 10.000 cas. Chez la plupart des patients, la réaction se manifestait dans le premier mois suivant le début du traitement. Un certain nombre de ces patients présentaient déjà une fonction rénale amoindrie et/ou des antécédents de réactions d’hypersensibilité à l’allopurinol. En cas de traitement au fébuxostat, il est recommandé d’instaurer la dose progressivement et d’effectuer un suivi régulier du patient. En cas d’apparition de symptômes indiquant une réaction d’hypersensibilité, le traitement au fébuxostat doit être immédiatement interrompu et ne doit plus être réinstauré2-4.

Prise en charge des troubles gastriques

La conclusion émanant d’études rétrospectives selon laquelle l’usage concomitant d’IPP et de clopidogrel augmenterait le risque cardio-vasculaire, n’a pas pu être confirmée dans des études randomisées5. Dans une étude observationnelle menée à grande échelle au Royaume-Uni, il n’a pas non plus été possible de démontrer une inter‑action cliniquement pertinente chez les patients sous clopidogrel utilisant de manière intermittente des IPP: l’incidence d’infarctus n’était pas augmentée en cas d’utilisation d’IPP6. Bien que rien n’indique qu’il y ait une interaction cliniquement pertinente, il est néanmoins conseillé d’observer un intervalle de 12 heures environ entre la prise d’IPP et de clopidogrel, par mesure de précaution7.


Prise en charge des douleurs neurogènes

  • Les preuves d’efficacité des antidépresseurs tricycliques tels que l’amitriptyline, dans les douleurs neurogènes, sont issues d’un nombre limité d’études à petite échelle et de courte durée; il s’agit d’études plus anciennes dont la qualité est limitée si l’on prend en considération les normes actuelles. Une synthèse de Cochrane rassemble pour la première fois toutes les études menées autour de l’amitriptyline dans le traitement de douleurs neurogènes (et de la fibromyalgie). Lorsque que l’on considère dans leur ensemble les résultats de toutes les études contrôlées par placebo sur l’amitriptyline dans la neuropathie diabétique douloureuse, la névralgie post-herpétique, la douleur suite à un AVC et la fibromyalgie, on observe avec l’amitriptyline un effet statistiquement significatif mais dont l’impact clinique est limité, par rapport au placebo: 38 contre 16 % (RR= 2,3; IC à 95 % 1,8 à 3,1). Les auteurs avertissent que l’effet est très probablement surestimé, vu les limites méthodologiques des études incluses. Toutefois, bien que les preuves d’efficacité de l’amitriptyline soient limitées, certaines données amènent les auteurs à conclure que ce médicament donne une analgésie acceptable chez certains patients. Le nombre de patients ressentant des effets indésirables était significativement plus élevé avec l’amitriptyline qu’avec le placebo. Il nous faut à présent attendre les résultats d’études rigoureusement menées comparant les médicaments plus récents (tels que la prégabaline, la duloxétine,) avec l’amitriptyline8.
  • La mise à jour d’une synthèse de Cochrane sur le patch de capsaïcine à doses élevées inclut 6 études, dont 4 chez des patients atteints de névralgie post-herpétique (n = 1.272). Il s’agit d’études récentes à relativement grande échelle, ayant évalué une application unique, avec un suivi de 8 à 12 semaines, les critères d’évaluation étant variés. Dans le traitement de la névralgie post-herpétique, le patch de capsaïcine s’avérait significativement plus efficace que le placebo sur tous les critères d’évaluation rapportés, les NNT allant de 10 à 12. Le seul critère d’évaluation ayant été rapporté de manière cohérente dans les 4 études, était le nombre de patients dont les douleurs avaient diminué d’au moins 30 % après 8 semaines [RR= 1,3 (IC à 95 % 1,1 à 1,5); NNT=11 (IC à 95 % 6,8 à 26)], mais la capsaïcine s’avérait également significativement plus efficace que le placebo en ce qui concerne le nombre de patients dont les douleurs avaient diminué d’au moins 50 % après 8 ou 12 semaines. Le nombre de patients rapportant des rougeurs, des douleurs (sensations de brûlure ou douleurs lancinantes), mais aussi d’autres réactions cutanées telles que des papules, du prurit ou de l’oedème était significativement plus élevé dans les groupes traités à la capsaïcine. Par une comparaison indirecte (propice aux erreurs), les auteurs affirment que les NNT pour certains autres traitements des douleurs neurogènes (prégabaline, gabapentine) sont moins élevés que pour la capsaïcine. Ils concluent que, vu leur coût et leurs effets indésirables importants, les patchs de capsaïcine doivent être réservés de préférence aux personnes chez lesquelles d’autres traitements ont échoué9.

Prise en charge de l’angor stable

  • Il existe peu de données concernant la comparaison entre les différentes dihydropyridines en cas d’angor. Dans 3 études à petite échelle et de courte durée, aucune différence n’a pu être observée entre l’amlodipine et la félodipine en ce qui concerne le contrôle des symptômes et les effets indésirables; il n’y a pas de données concernant la mortalité10.
  • Dans l’étude FAME-2, on a identifié, chez des patients souffrant d’une coronaropathie, la présence d’une sténose hémodynamiquement significative en mesurant la réserve de débit fractionnaire lors d’une angiographie coronarienne; la plupart de ces patients présentaient un angor stable. Les patients présentant une sténose hémodynamiquement significative (73 % du groupe étudié) ont été randomisés entre une ACTP avec stent + traitement médicamenteux optimal ("traitement invasif ") et un traitement médicamenteux optimal uniquement. Le critère d’évaluation primaire était composé de la mortalité, de l’infarctus du myocarde et de la revascularisation urgente. L’étude a été arrêtée prématurément après 7 mois lorsque l’on a constaté que ce critère d’évaluation primaire survenait significativement moins fréquemment dans le groupe traité de manière invasive (4,3 contre 12,7 %). Le fait que cette différence soit significative s’explique entièrement par la moins grande nécessité de revascularisation urgente dans le groupe traité de manière invasive (1,6 contre 11,1 %); la mortalité cardiaque et totale et le nombre d’infarctus du myocarde ne différaient pas significativement entre les deux groupes. L’absence de mise en aveugle et l’arrêt prématuré constituent des limites méthodologiques importantes. Cette étude ne rajoute rien aux connaissances actuelles: en cas d’angor stable, une ACTP peut améliorer le contrôle des symptômes, mais ne diminue pas le risque d’infarctus du myocarde ou de décès11.

Aide au sevrage tabagique

  • Par le passé, l’association de la varénicline à un risque accru d’accidents cardio-vasculaires avait déjà été suggérée. Dans une méta-analyse de 2011, on a constaté un risque significativement accru d’accidents cardio-vasculaires graves, en comparaison avec le placebo12. Plus récemment, dans deux méta-analyses d’études contrôlées par placebo, dont une méta-analyse menée à la demande de la FDA par le fabricant de la varénicline, ce risque accru n’a pas pu être retrouvé. On a toutefois observé dans les deux méta-analyses une tendance en défaveur de la varénicline (respectivement 0,63 contre 0,47 % et 0,31 contre 0,21 % selon la méta-analyse), mais ces différences n’étaient pas statistiquement significatives13,14. Dans une étude observationnelle danoise, l’incidence d’accidents cardio-vasculaires sévères associée à la varénicline a été comparée à celle associée à la bupropione, un médicament n’étant pas assimilé à un risque cardio-vasculaire accru selon les connaissances actuelles; aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes15. Ces constatations semblent rassurantes, mais des études ayant comme critère d’évaluation primaire des accidents cardio-vasculaires restent nécessaires afin de les confirmer.
  • La plupart des études concernant les interventions de sevrage tabagique sont réalisées dans des conditions contrôlées qui divergent fortement des conditions de la pratique quotidienne. Les études sont menées avec des patients motivés et du personnel qualifié, et en général, le traitement est gratuit. Dans une étude randomisée menée en première ligne, dans laquelle le médecin traitant n’avait pas reçu de formation préparatoire spécifique, l’intervention minimale à partir d’un journal de fumeur, la thérapie cognitive et comportementale, la bupropione et la thérapie nicotinique de substitution s’avéraient similairement efficaces pour atteindre le sevrage tabagique: après 1 an, environ 30 % des patients sont restés abstinents dans les 4 groupes16.

Prévention secondaire des accidents vasculaires cérébraux (AVC)

Chez les patients atteints d’un infarctus cérébral lacunaire, l’association de clopidogrel avec de l’acide acétylsalicylique ne diminue pas significativement le risque d’un nouvel AVC, en comparaison avec une monothérapie à l’acide acétylsalicylique; en revanche, l’association augmente le risque d’hémorragies et de mortalité17. Les infarctus cérébraux lacunaires représentent un quart de tous les AVC ischémiques et sont provoqués par l'occlusion de petits vaisseaux sanguins. Dans cette étude randomisée, les patients atteints d’un infarctus lacunaire symptomatique (confirmé par RM) qui recevaient déjà 325 mg d’acide acétylsalicylique par jour, ont été randomisés entre un traitement avec 75 mg de clopidogrel par jour et un placebo. Après une période de suivi de 3,4 ans en moyenne, le risque d’un nouvel AVC n’était pas réduit dans le groupe traité par l’association (hazard ratio = 0,92; IC à 95 % 0,72 à 1,16). Le risque d’hémorragies sévères était presque deux fois plus élevé chez les patients traités avec l’association (hazard ratio = 1,97; IC à 95 % 1,41 à 2,71)17.


Prise en charge de la migraine, de l’obésité, de l’ostéoporose, du zona:

aucune nouvelle donnée pertinente pour cette mise à jour n’est parue sur ces sujets au cours de cette dernière année.


Références

1. ANSM.: Allopurinol et risque de survenue de toxidermies graves. Information destinée aux prescripteurs et aux pharmaciens. Lettre aux professionels de santé Février 2013. http://ansm.sante.fr/S-informer/Informations-de-securite-Lettres-aux-professionnels-de-sante/Allopurinol-et-risque-de-survenue-de-toxidermies-graves-Lettre-aux-professionnels-de-sante

2. Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique.: Réactions graves d’hypersensibilité avec le fébuxostat. Folia Farmacotherapeutica 2012; 39: 81 .

3. Anonymous.: Risk of serious hypersensitivity reactions with febuxostat. Drug Ther Bull 2012; 50: 100.

4. Anonymous.: Schwere Uberempfindlichkeitsreaktionen unter febuxostat (Adenuric). Arznei-telegramm 2012; 43: 40.

5. Katz PE, Gerson LB, Vela MF.: Guidelines for the diagnosis and management of gastroesophageal reflux disease. Am J Gastroenterol 2013; 108: 308-28 (doi:10.1038/ajg.2012.444).

6. Douglas IJ, Evans SJ, D Hignorani AD, et al.: Clopidogrel and interaction with proton pump inhibitors: comparison between cohort and within person study designs. BMJ 2012; 345: e4388 (doi:10.1136/bmj.e4388).

7. Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique. Répertoire Commenté des Médicaments 2013. www.cbip.be

8. Moore RA, Derry S, Aldington D, Cole P, Wiffen PJ.: Amitriptyline for neuropathic pain and fibromyalgia in adults. Cochrane Database Syst Rev 2012; 12: Art. No.: CD008242 (doi: 10.1002/14651858.CD008242.pub2).

9. Derry S, Rice ASC, Cole P, Tan T, Moore RA.: Topical capsaicin (high concentration) for chronic neuropathic pain in adults. Cochrane Database Syst Rev 2013; 2 Art. No.: CD007393. (doi:10.1002/14651858.CD007393.pub3).

10. UK Medicines Information. How do amlodipine and felodipine compare for the treatment of stable angina? Medicines Q & As October 15, 2012. http://www.evidence.nhs.uk

11. De Bruyne B, Pijls NH, Kalesan B, et al. for the FAME 2 Trial Investigators.: Fractional flow reserve-guided PCI versus medical therapy in stable coronary disease. N Engl J Med 2012; 367: 991-1001 (doi: 10.1056/NEJMoa1205361).

12. Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique.: Varénicline et risque accru d’accidents cardio-vasculaires. Folia Pharmacotherapeutica 2011; 38: 78 .

13. Prochaska JJ, Hilton JF.: Risk of cardiovascular serious adverse events associated with varenicline use for tobacco cessation: systematic review and meta-analysis. BMJ 2012; 344: e2856 (doi:10.1136/bmj.e2856).

14. http://www.fda.gov/Drugs/DrugSafety/ucm330367.htm

15. Svanström H, Pasternak B, Hviid A.: Use of varenicline for smoking cessation and risk of serious cardiovascular events: nationwide cohort study. BMJ 2012;: e7176 (doi:10.1136/bmj.e7176).

16. Wittchen HU, Hoch E, Klotsche J, Muehlig S.: Smoking cessation in primary care- a randomized controlled trial of bupropione, nicotine replacements, CBT and a minimal intervention. In J Methods Psychiatr Res 2011; 20: 28-39 .

17. SPS3 Investigators, Benavente OR, Hart RG, et al.: Effects of clopidogrel added to aspirin in patients with recent lacunar stroke. N Engl J Med 2012; 367: 817-25 (doi: 10.1056/NEJMoa1204133).