Traitement médicamenteux de la dysménorrhée primaire

La dysménorrhée primaire est une plainte fréquente chez les jeunes femmes. Elle se distingue de la dysménorrhée secondaire par l’absence de pathologie sous-jacente. Le moment d’apparition du premier épisode de dysménorrhée et les symptômes associés à la douleur peuvent apporter une aide au diagnostic différentiel.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et la contraception hormonale sont les traitements de premier choix. Les données disponibles ne permettent pas d’élire un premier choix parmi les différents AINS. Toutes les méthodes de contraception hormonale ont montré leur efficacité dans le contrôle de la douleur, mais les estroprogestatifs oraux sont les mieux étudiés. Une prise continue ou prolongée plutôt qu’une prise cyclique est à envisager. Les autres méthodes contraceptives pouvant être utilisées de manière continue sont par exemple les progestatifs oraux, l’implant ou le dispositif intra-utérin au lévonorgestrel.
Si les symptômes persistent ou s’aggravent après 3 à 6 mois de traitement, un examen gynécologique est recommandé afin d’exclure une pathologie sous-jacente.

Introduction

La dysménorrhée primaire se définit comme des douleurs survenant juste avant ou pendant les menstruations, en l’absence d’une pathologie pelvienne ou organique sous-jacente1,2. La douleur est récurrente, souvent comparable à des crampes, localisée dans le bas de l’abdomen et pouvant rayonner jusque dans le dos. Le délai d’apparition de la douleur est de quelques heures avant à quelques heures après l’apparition des premiers saignements, et peut persister jusqu’au troisième jour des menstruations. Elle est souvent accompagnée d’autres symptômes comme par exemple nausées, vomissements, diarrhée, maux de tête, crampes musculaires, diminution de la qualité du sommeil, vertiges1-3. La dysménorrhée primaire commence souvent 6 à 24 mois après la ménarche1-2.
La dysménorrhée primaire est une plainte fréquente chez les jeunes femmes. Bien que bénigne, cette affection peut avoir des impacts négatifs sur la qualité de vie1.
 
La dysménorrhée primaire est à différencier de la dysménorrhée secondaire, dans laquelle les douleurs menstruelles sont liées à une cause organique sous-jacente1-3. Dans la dysménorrhée secondaire, certaines caractéristiques de la douleur peuvent différer de celles de la dysménorrhée primaire. La dysménorrhée secondaire va de pair avec d’autres symptômes supplémentaires, correspondant à la pathologie. Se renseigner sur ces différentes aspects apporte une aide au diagnostic différentiel1-2.

Dysménorrhée secondaire:
  • Causes: p.ex. endométriose, fibromes, kystes ovariens, polypes utérins, sténose cervicale ou adénomyose1-3.
  • Aide au diagnostic différentiel: saignements utérins anormaux, douleurs en milieu de cycle ou en l’absence de cycle menstruel, dysménorrhée dès la ménarche ou survenant à un âge plus avancé, infertilité, antécédents d’anomalie rénale1-2.

D’autres maladies pouvant provoquer des douleurs menstruelles sont par exemple une maladie inflammatoire pelvienne, des adhérences pelviennes, le syndrome de l’intestin irritable, des douleurs myofasciales ou une cystite interstitielle2.

Chez les patientes présentant des symptômes d’une dysménorrhée primaire, un examen gynécologique n’est pas nécessaire et un traitement médicamenteux empirique peut d’emblée être instauré1-2.

Traitement médicamenteux

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et la contraception hormonale sont les traitements de premier choix de la dysménorrhée primaire1-3.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les AINS diminuent le taux de prostaglandines responsables de la contraction de l’utérus, à l’origine de la douleur perçue pendant les menstruations1,2. On dispose de suffisamment de preuves solides, provenant d’études randomisées et contrôlées versus placebo, pour étayer l’efficacité des AINS dans le traitement de la dysménorrhée. Par contre, il n’est pas possible d’émettre un premier choix de traitement parmi les différents AINS, car la supériorité de l’un d’eux en termes d’efficacité ou d’innocuité n’a pas été démontrée1-3.
Il est recommandé de commencer le traitement par un AINS dès les premiers symptômes ou dès le début des menstruations, voire même un à deux jours avant1,3, et de prendre l’AINS de manière continue (pas "à la demande") jusqu’au deuxième ou troisième jour des menstruations. Un traitement de plus longue durée n’est pas nécessaire1-3.
Il convient de tenir compte de effets indésirables gastro-intestinaux et des contre-indications des AINS [voir Répertoire chapitre 9.1.]2.

Paracétamol

Une étude randomisée montre que le paracétamol est plus efficace que le placebo dans le traitement de la dysménorrhée2. Le paracétamol peut éventuellement être utilisé en cas de plaintes légères mais est probablement moins efficace que les AINS vu qu’il influe moins sur la production de prostaglandines2-5.

Contraception hormonale

L’inhibition de l’ovulation et de la prolifération de l’endomètre diminuent la libération de prostaglandines au sein de l’utérus, ce qui prévient sa contraction et donc la douleur associée1,3.
Le choix du type de contraceptif repose principalement sur la préférence de la patiente3. Les préparations monophasiques de deuxième génération présentent en général la meilleure balance bénéfice/risque [voir Répertoire chapitre 6.2.]. Les estroprogestatifs et les progestatifs à usage contraceptif se sont tous montrés efficaces par rapport à un placebo dans le traitement de la dysménorrhée, quelle que soit la formulation ou la voie d’administration1,2. Les estroprogestatifs oraux sont les plus étudiés. La prise continue ou prolongée d’estroprogestatifs oraux est à envisager ; ces schémas sont plus efficaces dans le contrôle de la douleur que le schéma classique (avec une pause de 7 jours), en tout cas à court terme1-4.

L’utilisation d’une préparation "à cycle étendu" (4 mois en continu) diminue la fréquence des menstruations mais provoque plus souvent du spotting. La spécialité disponible ne présente pas de plus-value par rapport à la prise continue d’une préparation monophasique de deuxième génération, et est plus onéreuse.

Les autres méthodes contraceptives utilisées de manière continue, comme par exemple les progestatifs oraux, l’implant ou le dispositif intra-utérin au lévonorgestrel, peuvent également être envisagées, certainement en cas de contre-indications pour les estrogènes1,2,5.

Méthodes non médicamenteuses

Les méthodes non médicamenteuses sont peu étudiées1,2. L’exercice physique et l’application locale de chaleur semblent aider à diminuer la douleur et peuvent être recommandés1,2. Les données sur l’efficacité et l’innocuité des suppléments alimentaires à base de plantes, des mesures diététiques et de la neurostimulation électrique transcutanée à haute fréquence sont limitées et contradictoires1-3.
 
Lorsque les AINS et la contraception hormonale ne permettent pas de contrôler suffisamment la douleur, il est recommandé de procéder à un examen gynécologique plus approfondi afin de rechercher une cause organique sous-jacente1-3.

Sources principales

1. K.A. Kho et J. K. Shields. Diagnosis and Management of Primary Dysmenorrhea Journal of the American Medical Association, 2020; 323:268-9. doi: 10.1001/jama.2019.16921
2. M. Burnett, M. Lemyre, et al. Primary Dysmenorrhea Consensus Guideline. Journal of Obstetrics and Gynaecology Canada, 2017; 39:585-595. doi: 10.1016/j.jogc.2016.12.023
3. Dysmenorrhea and endometriosis in the adolescent. ACOG Committee opinion No. 760. American College of Obstetricians and Gynecologists. Obstetrics and Gynecology, 2018; 132: e249-58. doi: 10.1097/AOG.0000000000002978.
4. FSRH Clinical Effectiveness Unit. Combined Hormonal Contraceptives. FSRH guideline. Faculty of Sexual & Reproductive Healthcare, 2019. https://www.fsrh.org/standards-and-guidance/documents/combined-hormonal-contraception/
5. Dysmenorroe. Farmacotherapeutisch Kompas, via https://www.farmacotherapeutischkompas.nl/bladeren/indicatieteksten/dysmenorroe