Raloxifène

Le raloxifène est, comme le tamoxifène, ce qu' on appelle un &quotmodulateur sélectif des récepteurs aux estrogènes&quot (&quotSelective Estrogen Receptor Modulator&quot ou SERM). Le tamoxifène était mentionné auparavant comme anti-estrogène.


Propriétés pharmacologiques

Le raloxifène est un benzothiophène non stéroïdien chimiquement apparenté au tamoxifène. Ces deux médicaments se lient aux récepteurs aux estrogènes, et exercent sur ceux-ci, en fonction des tissus, des effets agonistes et antagonistes sélectifs. Les propriétés (agoniste, antagoniste) au niveau des récepteurs du raloxifène, du tamoxifène et de l' estrogène 17β-estradiol au niveau de différents tissus sont reprises dans le tableau.[N.d.l.r.: concernant le tamoxifène, voir aussi Folia de juin 1995, de janvier 1997 et d&quote; octobre 1998].

17β-estradiol

Agoniste

Agoniste

Agoniste

Agoniste

Raloxifène Tamoxifène
Squelette Agoniste Agoniste

Foier

Agoniste

Agoniste

Sein

Antagoniste

Antagoniste

Endomètre

Antagoniste

Agoniste partiel

Les propriétés du raloxifène suggèrent qu' il pourrait exercer un effet d' épargne osseuse chez les femmes post-ménopausées, sans avoir les inconvénients de la stimulation au niveau du tissu mammaire et de l' endomètre propre aux estrogènes, et de l' effet agoniste partiel du tamoxifène au niveau de l' endomètre.


Effets sur le squelette

Une distinction s' impose ici entre les données provenant de femmes qui présentent des valeurs de densité osseuse normales, dans le cadre de la prévention de l' ostéoporose, et celles de femmes souffrant d' une ostéoporose avérée, dans le cadre du traitement de l' ostéoporose.

Dans ces deux situations, le raloxifène, à la dose de 60 mg par jour [n.d.l.r.: soit la dose journalière recommandée dans la notice], a un effet favorable sur les marqueurs biochimiques de la croissance osseuse ainsi que sur la densité osseuse au niveau des vertèbres lombaires, du col du fémur et de la hanche. [N.d.l.r.: ces effets du raloxifène sont toutefois moins marqués par rapport aux estrogènes.]

Chez les femmes avec une ostéoporose avérée, une diminution du risque de fractures vertébrales a été mise en évidence dans deux études randomisées en double aveugle contrôlées par placebo dans lesquelles le raloxifène a été administré à une dose de 60 ou 120 mg par jour: une étude d' un an chez 143 femmes, l' autre, de trois ans, chez 7.705 femmes (l' étude MORE). Dans l' étude MORE, le risque relatif de fractures vertébrales dans le groupe traité par 60 mg de raloxifène par jour était de 0,7 [intervalle de confiance à 95%: 0,5-0,8]. Le raloxifène n' a eu aucun effet sur l' incidence des fractures non vertébrales. Dans ces études, les femmes ont également reçu des suppléments de calcium en association ou non à de la vitamine D.

On ne dispose pas d' études à long terme qui comparent directement le raloxifène à un traitement hormonal de substitution ou aux diphosphonates.


Effets sur l' endomètre

Dans une étude contrôlée par placebo, aucune stimulation de l' endomètre n' a été observée avec le raloxifène administré pendant 8 semaines à une dose élevée (200 ou 600 mg par jour). Dans deux autres études (la première d' une durée d' un an, l' autre d' une durée de deux ans), il a été observé que le raloxifène (60, 120 ou 150 mg par jour) n' entraînait pas d' épaississement de l' endomètre et n' augmentait pas le risque de saignements vaginaux. Les données disponibles a ce jour n' indiquent pas non plus une augmentation du risque de carcinome de l' endomètre lors d' un traitement par le raloxifène ayant duré jusqu' à 3 ans.


Effets sur les lipides

Dans une étude contrôlée par placebo en double aveugle qui a comparé le raloxifène (60 ou 120 mg par jour) au traitement hormonal de substitution (estrogène + progestatif), il a été observé que le raloxifène diminuait de 12% le taux de cholestérol LDL, sans modification des taux de cholestérol HDL et de triglycérides. Chez les femmes sous traitement hormonal de substitution, une diminution comparable (14%) du taux de cholestérol LDL a été observée mais il y avait une augmentation des taux de cholestérol HDL et de triglycérides. A l' instar de la substitution hormonale, on ne connaît pas les répercussions de ces modifications du profil lipidique sur le risque cardio-vasculaire.


Effets au niveau du tissu mammaire

Avec le raloxifène, les douleurs et tensions mammaires (survenant chez environ 2 à 4% des femmes) ne semblent pas plus fréquentes que sous placebo.

Une analyse des résultats de l' étude MORE mentionnée ci-dessus, réalisée chez des femmes avec une ostéoporose avérée, a montré une diminution importante du risque de carcinome mammaire invasif avec le raloxifène administré pendant 40 mois (valeur médiane): risque relatif de 0,24 [intervalle de confiance à 95% 0,13-0,44]. Pour prévenir un cancer du sein, 126 femmes devraient être traitées pendant 40 mois. Cette diminution du risque avec le raloxifène n' est valable que pour le carcinome mammaire invasif sensible aux récepteurs d' estrogènes, et non pour le carcinome mammaire non sensible aux récepteurs d' estrogènes. Les auteurs d' un éditorial dans le British Medical Journal font remarquer que l' effet du raloxifène sur le cancer du sein était un critère d' évaluation secondaire de l' étude MORE, et qu' une telle observation n' a pas la même valeur qu' un critère d' évaluation primaire d' une étude prospective clinique. L' effet sur le risque de cancer du sein chez des femmes traitées par le raloxifène pendant plus de 40 mois n' est pas connu.


Effets indésirables

Le raloxifène peut aggraver les bouffées de chaleur liées à la périménopause.

Le risque de thrombo-embolie veineuse est environ 2,5 fois plus élevé chez les femmes sous raloxifène que chez les femmes sous placebo. Cette augmentation du risque est du même ordre de grandeur que pour le traitement hormonal de substitution et correspond à un risque absolu d' environ 3 accidents thrombo-emboliques veineux par 10.000 femmes traitées pendant un an. [N.d.l.r.: l' incidence de la thrombo-embolie veineuse idiopathique chez des femmes qui ne suivent pas de traitement hormonal de substitution est d' environ 1 cas par 10.000 femmes par an; un risque deux à trois fois plus élevé entraîne 1 à 2 cas supplémentaires par 10.000 femmes par an [voir Folia de janvier 1998].

Environ 5,5% des femmes sous raloxifène présentent des crampes dans les mollets. Un cas d' hépatite associée à un rash et à une éosinophilie modérée, pouvant être dû au raloxifène, a été publié.


Contre-indications et précautions

Le raloxifène ne peut être utilisé qu' après la ménopause. Il est contre-indiqué en cas d' antécédents de thrombose veineuse profonde ou de thrombo-embolie, d' insuffisance hépatique (y compris de cholestase), d' insuffisance rénale grave, de carcinome mammaire ou endométrial ainsi qu' en présence d' hémorragies utérines inexpliquées. Dans la notice, il est mentionné que des hémorragies utérines ne se manifestent normalement pas lors d' un traitement par le raloxifène, et que si de telles hémorragies devaient survenir, il faudrait en rechercher la cause.

La colestyramine diminue aussi bien la résorption que la recirculation entéro-hépatique du raloxifène; la notice recommande donc de ne pas prendre ces deux médicaments en même temps. Le raloxifène peut allonger modérément le temps de prothrombine chez les patients traités par la warfarine ou un autre dérivé coumarinique.


Place du raloxifène

Le raloxifène est une possibilité thérapeutique pour les femmes post-ménopausées qui présentent un risque d' ostéoporose et qui ne souhaitent pas avoir de saignements cycliques mensuels. Il peut être aussi préférable au traitement hormonal de substitution lorsque des douleurs ou des tensions mammaires sont mal supportées. D' après les données actuelles, il y a peu d' autres raisons pour recommander le raloxifène. Le traitement hormonal de substitution reste le premier choix pour la prévention de l' ostéoporose chez la plupart des femmes post-ménopausées.

Le coût d' un traitement par le raloxifène est plus élevé que celui d' un traitement hormonal de substitution.

D' après

  • Raloxifen to prevent postmenopausal osteoporosis. Drug Ther Bull 37 : 33-36(1999)
  • E.C. Weening: Raloxifene. Oestrogeensuppletie zonder de nadelen ervan? Pharma Selecta 15 : 31-34(1999)
  • B. Ettinger et al: Reduction of vertebral fracture risk in postrnenopausal women with osteoporosis treated with raloxifene. Results from a 3-year randomized clinical trial. JAMA 282 : 637-645(1999)
  • S.R. Cummings et al.: The effect of raloxifene on risk of breast cancer in postmenopausal women. JAMA 281 : 2189-2197(1999)
  • Raloxifene as a multifunctional medicine? Current trials will show whether it is effective in both osteoporosis and breast cancer. Brit Med J 319 : 331-332(1999)

Noms de spécialités


Raloxifène: Evista

Tamoxifène: Nolvadex Tamizam Tamoplex Tamoxifen

  • L' indication du raloxifène telle qu' elle figure dans la notice belge est la prévention et le traitement de l' ostéoporose chez les femmes post-ménopausées. Il est clairement mentionné qu' une diminution significative de l' incidence des fractures vertébrales mais non des fractures de hanche est démontrée.
  • Bien que la prudence soit de rigueur en ce qui concerne les effets à long terme du raloxifène sur le risque de carcinome mammaire, les résultats encourageants de l' étude MORE ne peuvent pas être contestés. En ce qui concerne l' utilisation d' un traitement hormonal de substitution, il convient d' être prudent chez les femmes qui présentent déjà un risque élevé de carcinome mammaire (antécédents personnels, antécédents familiaux chez des proches au premier degré, c' est-à-dire mère, soeur ou fille, antécédents de fibroadénome ou d' hyperplasie atypique) en raison de la légère, et probablement réelle, augmentation du risque de carcinome mammaire. Si un traitement préventif de l' ostéoporose est clairement indiqué chez ces femmes, le raloxifène peut être une alternative au traitement hormonal de substitution.
  • L' absence de preuve quant à un effet sur les fractures non-vertébrales est une restriction importante au traitement par le raloxifène; c' est cependant peut-être aussi le cas pour les estrogènes dont l' effet à long terme sur les fractures de la hanche n' est pas non plus bien documenté pour le moment.