Retrait de la cérivastatine du marché

La cérivastatine (CHOLSTAT, LIPOBAY), un hypolipidémiant du groupe des statines, a été récemment retirée du marché au niveau mondial par les firmes concernées. Cette décision fait suite à l’observation aux Etats-Unis mais aussi ailleurs, d’un nombre anormalement élevé de cas de rhabdomyolyse avec insuffisance rénale aiguë et décès chez des patients qui avaient pris de la cérivastatine.

Il est bien établi que les statines en général peuvent être toxiques pour les muscles, et qu’elles peuvent provoquer des myalgies, des crampes musculaires et éventuellement une augmentation des enzymes musculaires (CPK). Des cas de rhabdomyolyse sont cependant extrêmement rares. L’enregistrement de plus de 50 décès chez des patients traités par la cérivastatine était inattendu; un grand nombre d’entre eux étaient également traités par le gemfibrozil, un fibrate. Deux hypothèses sont actuellement avancées pour expliquer ce nombre élevé de complications graves: d’une part, l’association avec le gemfibrozil et, d’autre part, l’utilisation aux Etats-Unis d’une posologie élevée de cérivastatine (0,8 mg par jour), soit deux à trois fois plus que la posologie préconisée en Belgique. Le gemfibrozil (anciennement commercialisé sous le nom de LOPID) a été retiré du marché belge en 1997, pour des raisons qui n’avaient rien à voir avec la survenue d’effets indésirables.

La question qui se pose d’emblée est de savoir dans quelle mesure on peut être certain qu’avec les autres statines, qui présentent aussi une toxicité musculaire, les problèmes sont suffisamment rares pour justifier la poursuite de leur utilisation. Actuellement, on pense que c’est effectivement le cas, mais les lettres que des firmes ont envoyées au sujet de leur propre statine ne peuvent être totalement rassurantes.

C’est en tout cas le moment de réévaluer chez les patients sous statines l’indication d’un tel traitement, en tenant compte du risque cardio-vasculaire. Une distinction nette doit par ailleurs être faite entre la prévention secondaire et la prévention primaire: en prévention secondaire, le bénéfice absolu des statines en terme de morbidité et de mortalité est beaucoup plus élevé qu’en prévention primaire pour laquelle les mesures diététiques restent primordiales.

Les patients qui prenaient de la cérivastatine et chez qui l’indication d’une statine est bien confirmée peuvent être orientés vers une autre statine. Si, au cours du traitement par n’importe quelle statine, des myalgies, des crampes musculaires, ou une augmentation des CPK jusqu’à trois fois la valeur normale maximale surviennent, le traitement par cette statine doit être interrompu et, celle-ci peut être remplacée par une autre statine, après réévaluation de l’indication et tout en restant attentif à la survenue éventuelle d’une toxicité musculaire. Il est utile de rappeler que pour toutes les statines, le risque d’atteinte musculaire est accru en cas d’association à un fibrate ou à la ciclosporine, et que pour certaines statines, un risque accru a également été observé en cas d’association à certains macrolides, dérivés azoliques, et inhibiteurs des protéases inhibant le métabolisme de ces statines.

La pharmacovigilance a démontré son rôle et son efficacité dans la découverte d’évènements rares: ce communiqué constitue un appel aux médecins et aux pharmaciens pour qu’ils notifient les effets indésirables liés aux médicaments, notamment ceux concernant les statines. En Belgique, ces notifications peuvent être adressées au Centre Belge de Pharmacovigilance, au moyen des fiches jaunes.