Faut-il prescrire un antibiotique en cas d’abcès dentaire?


Abstract

Le traitement des abcès dentaires aigus repose avant tout sur la chirurgie dentaire locale. Une antibiothérapie n’est indiquée que dans la cellulite d’origine dentaire s’accompagnant de signes généraux. Dans ce cas, une amoxicilline, ou un macrolide [n.d.l.r.: en cas de contre-indication à une pénicilline], peut être prescrit en première intention, après ou immédiatement avant l’acte dentaire, pour une durée de 3 à 5 jours.

Les abcès dentaires sont dus à la prolifération de germes aérobies et anaérobies présents dans la flore buccale, le plus souvent au départ de caries dentaires. Bien qu’on ne dispose pas d’études comparatives rigoureuses permettant de préciser la place de l’antibiothérapie dans le traitement de l’abcès dentaire, il apparaît sur base de l’évolution naturelle des abcès et de l’expérience clinique que l’antibiothérapie ne peut pas remplacer l’acte dentaire thérapeutique (conservateur ou radical). L’adjonction d’une antibiothérapie à l’acte dentaire peut être envisagée dans certains cas, en fonction du type d’abcès dentaire. Il convient en effet de distinguer les abcès dentaires aigus localisés, dans lesquels l’infection est limitée à l’organe dentaire et à son tissu de soutien, et les cellulites d’origine dentaire pouvant être à l’origine de complications.

  • En cas d’abcès dentaire aigu localisé, un traitement chirurgical dentaire local est généralement suffisant pour autant que le drainage du pus ait pu être effectué, et une antibiothérapie n’est pas nécessaire chez les personnes par ailleurs en bonne santé. Une seule étude de petite taille, contrôlée par placebo, n’a pas montré de différence significative sur la vitesse de guérison entre le traitement dentaire seul et l’adjonction de pénicilline per os.
  • En cas de cellulite d’origine dentaire, s’accompagnant de signes généraux (fièvre, adénopathies,...), il existe un consensus basé sur l’expérience clinique selon lequel une antibiothérapie est indiquée mais on ne dispose pas d’étude contrôlée par placebo. Bien qu’il n’y ait pas non plus d’études comparant l’efficacité d’un traitement antibiotique en fonction du moment où il est commencé (avant ou après l’acte dentaire), la prise d’antibiotiques ne sera généralement commencée qu’après le traitement dentaire ou immédiatement avant celui-ci. Les antibiotiques dont le spectre d’activité couvre les germes susceptibles d’être en cause sont: les pénicillines, les macrolides, la spiramycine, la pristinamycine [n.d.l.r.: son intérêt est toutefois limité par sa faible résorption], la clindamycine et la lincomycine, et les dérivés de l’imidazole tel le métronidazole. En l’absence d’études comparatives rigoureuses, le choix de l’antibiotique est empirique et dépend de facteurs tels le risque d’effets indésirables, l’induction de résistance bactérienne, la facilité d’utilisation, le coût... Sur base des données disponibles, la préférence doit être donnée à une monothérapie par l’amoxicilline, ou par un macrolide [n.d.l.r.: en cas de contre-indication à une pénicilline]. Il n’est pas recommandé d’utiliser en première intention l’association amoxicilline+acide clavulanique ou la clindamycine. Un traitement de courte durée de 3 à 5 jours est généralement suffisant pour autant que le foyer dentaire ait été éradiqué. En l’absence d’amélioration clinique dans les 48 à 72 heures qui suivent l’acte dentaire, il y a lieu avant tout de suspecter la persistance d’un foyer dentaire résiduel, et d’envisager un nouveau traitement local plutôt que de remettre en question le choix de l’antibiotique.

  • Abcès d’origine dentaire. La Revue Prescrire 21 : 521-530(2001)

Note de la rédaction

Chez les patients atteints d’une affection cardiaque à risque élevé ou intermédiaire d’endocardite, un traitement antibiotique prophylactique est recommandé en cas d’interventions comportant un risque élevé de bactériémie. Pour plus de détails concernant les recommandations en matière de prophylaxie antibiotique de l’endocardite infectieuse, voir Folia de mars 2000