Hépatotoxicité des antiinflammatoires non stéroïdiens

En mars 2002, les autorités finlandaises ont annoncé leur décision de suspendre la mise sur le marché du nimésulide, un antiinflammatoire non stéroïdien (AINS) commercialisé en Belgique depuis 1996 sous le nom de MESULID. Cette décision fait suite à l' observation d' atteintes hépatiques graves chez des patients traités par ce médicament: au niveau international, 123 cas d' hépatotoxicité grave, dont 12 d' évolution fatale, ont été rapportés via des systèmes de notification spontanée (données datant du mois d’août 2001). Il s’agissait, soit d’hépatites cytolytiques, soit d’hépatites cholestatiques. L' hépatotoxicité du nimésulide est bien établie [voir aussi Folia de septembre 1999, ; août 1998 et de septembre 1996].

Dans l' attente d' une réévaluation au niveau européen de la balance bénéfices/ risques du nimésulide et à la demande des autorités belges, la firme responsable de la mise sur le marché du MESULID a envoyé aux médecins et aux pharmaciens un courrier rappelant l' existence de ce risque d' hépatotoxicité, la nécessité d' interrompre immédiatement le traitement en cas d' apparition de signes évoquant une atteinte hépatique et la contre-indication d' une réadministration ultérieure si l’hépatotoxicité est confirmée.

Selon l' ouvrage de référence Davies' Textbook of Adverse Drug Reactions [Chapman & Hall Medical, 5ème édition 1998], l' incidence d' atteintes hépatiques symptomatiques liées aux AINS en général est estimée entre 1 et 50 pour 100.000 patients traités. Une élévation asymptomatique des transaminases est cependant plus fréquente (incidence de l' ordre de 15%). Les données recueillies par les systèmes de notification spontanée ne permettent pas de comparer le risque d' hépatotoxicité de différents AINS; des études épidémiologiques sont nécessaires pour obtenir cette information. Selon une étude cas-témoins publiée en 1994 [ Arch Intern Med 154 : 311-316(1994) ], le sulindac (CLINORIL) est l' AINS pour lequel le risque d' hépatotoxicité aiguë observé était le plus élevé (148,1 cas pour 100.000 patients traités). Pour les AINS en général, une incidence de 3,7 cas pour 100.000 patients a été calculée sur base des résultats de cette étude; le risque le plus faible fut observé avec l' ibuprofène: 1,6 cas pour 100.000 patients. D’autres facteurs de risque étaient l’exposition à d' autres médicaments hépatotoxiques et une arthrite rhumatoïde. D' autres sources mentionnent qu' outre le sulindac, le diclofénac présente aussi un risque important d' hépatotoxicité [ J Hepatol 29 : 135-141(1998) ; Meyler' s Side Effects of Drugs, 14ème].

L' hépatotoxicité des AINS se manifeste généralement au cours des premiers mois du traitement. En cas d' atteinte hépatique après prise d' un AINS et si un traitement par un AINS s' impose, il est recommandé d' utiliser un AINS appartenant à un autre sous-groupe.