Courrier du lecteur: traitement antiagrégant en période périopératoire

Un lecteur nous a demandé ce qu’il convient de faire chez un patient traité par le clopidogrel et qui doit subir une intervention chirurgicale. La prise en charge du traitement antiagrégant dans ce contexte n’est pas simple, surtout chez les patients porteurs d’un stent coronarien, et elle implique de mettre en balance le risque hémorragique lié à l’intervention chirurgicale et le risque de thrombose du stent. Cet article résume, sur base de quelques publications récentes [ Chest 2008; 133: 299-339; Circulation 2007; 115: 813-8 ; Heart 2009; 95: 1303-8 ], les principales recommandations en ce qui concerne la prise en charge du traitement antiagrégant en période périopératoire [voir aussi Folia de janvier 2008 ].


Traitement antiagrégant en cas d’intervention chirurgicale programmée (non urgente)


Patients avec un risque cardio-vasculaire élevé

  • Patients sans stent coronarien: chez ces patients, il est recommandé de poursuivre le traitement par l’acide acétylsalicylique et d’arrêter le clopidogrel au moins 5 jours (de préférence 10 jours) avant l’intervention. Après l’intervention, le clopidogrel doit être repris en principe le plus rapidement possible; en fonction du risque, il convient d’administrer à nouveau une dose de charge de 150 à 300 mg.
  • Patients porteurs d’un stent coronarien: chez ces patients, le risque de thrombose est très élevé en cas d’interruption (même partielle) du traitement antiagrégant. Il est dès lors recommandé de ne pas interrompre le traitement antiagrégant par l’acide acétylsalicylique et le clopidogrel pendant les 6 premières semaines suivant la mise en place d’un stent métallique (bare metal stent ou BMS) et pendant les 12 premiers mois suivant la mise en place d’un stent médicamenteux (drug eluting stent ou DES), et de postposer si possible l’intervention. Si l’intervention chirurgicale ne peut pas être postposée et que le clopidogrel doit quand même être arrêté en raison du risque hémorragique élevé, il est alors conseillé de poursuivre au moins la prise d’acide acétylsalicylique et de reprendre le clopidogrel le plus rapidement possible après l’intervention avec une dose de charge de 300 à 600 mg. Il n’existe pas suffisamment de preuves pour recommander systématiquement un traitement de substitution par d’autres médicaments antithrombotiques tels que l’héparine, les inhibiteurs de la thrombine, les antagonistes des récepteurs de la glycoprotéine IIb/IIIa.

Patients avec un faible risque cardio-vasculaire

Chez ces patients, il est généralement recommandé d’interrompre la prise d’acide acétylsalicylique ou de clopidogrel 7 à 10 jours avant l’intervention et de reprendre le traitement antiagrégant 24 heures après l’intervention pour autant que l’hémostase soit contrôlée.


Traitement antiagrégant en cas d’intervention chirurgicale urgente

Aucun médicament ne peut contrecarrer l’effet antithrombotique des antiagrégants, et seule une transfusion de plaquettes permet alors de restaurer l’hémostase.

  • La transfusion de plaquettes à titre préventif avant une intervention chirurgicale urgente n’est toutefois pas recommandée vu l’absence de données concernant l’efficacité et l’innocuité.
  • En cas d’hémorragie grave , la transfusion de plaquettes s’avère souvent nécessaire. L’administration de médicaments antihémorragiques tels que la vasopressine ou l’acide tranexamique peut être une alternative à la transfusion de plaquettes, mais vu leur risque thrombogène, ces médicaments ne devraient être utilisés qu’en présence d’une hémorragie mettant la vie en danger.