5 juin 2009

Interaction possible entre le clopidogrel et les inhibiteurs de la pompe à protons

 

Suite à un communiqué de la Food and Drug Administration (FDA) américaine, les Folia de février 2009 attiraient déjà l’attention sur le fait que certains médicaments, tels que les inhibiteurs de la pompe à protons, peuvent diminuer l’efficacité du clopidogrel (Plavix®. L’Agence européenne des médicaments (EMEA) a publié récemment un avertissement concernant une interaction possible entre le clopidogrel et les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP’s) [via  www.emea.europa.eu/humandocs/PDFs/EPAR/Plavix/32895609en.pdf , et repris sur le site de l’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé via www.fagg-afmps.be/fr].

Deux études de cohorte rétrospectives suggèrent en effet que le clopidogrel pourrait être moins efficace chez les patients recevant un IPP.

- La première étude [JAMA 2009;301:937-44] ayant inclus 8.205 patients traités par du clopidogrel à la suite d’un syndrome coronarien aigu, a montré un risque accru de décès ou de réhospitalisation en raison d’un syndrome coronarien aigu (critère d’évaluation primaire combiné) chez les patients traités par le clopidogrel et un IPP (dans la plupart des cas l’oméprazole) par rapport aux patients traités uniquement par le clopidogrel (29,8% versus 20,8%). Il n’y avait par contre pas de différence entre les deux groupes en ce qui concerne la mortalité totale (critère d’évaluation secondaire).

- Les résultats de l’étude Clopidogrel Medco Outcomes [annoncés récemment mais pas encore publiés] suggèrent également la possibilité d’une interaction entre les IPP’s et le clopidogrel. Dans cette étude ayant inclus 16.690 patients traités par le clopidogrel suite à la mise en place d’un stent, le risque d’évènements cardio-vasculaires était également plus élevé dans le groupe sous IPP que dans le groupe sans IPP (25,1% versus 17,9%), et ce sans qu’il n’y ait de différence significative entre les différents IPP’s.

Cette diminution d’efficacité du clopidogrel pourrait peut-être s’expliquer entre autres par une interaction pharmacocinétique entre le clopidogrel et l’IPP au niveau du CYP2C19, principale enzyme responsable du métabolisme du clopidogrel sous sa forme active.

Jusqu’à présent, il n’est pas prouvé que d’autres médicaments diminuant l’acidité gastrique (tels que les antihistaminiques H2 et les antacides) influencent l’effet antiagrégant du clopidogrel.

Bien que les résultats d’études rétrospectives ne permettent pas de tirer des conclusions définitives, la prescription d’un IPP chez un patient sous clopidogrel  ne semble pas être une bonne association. Dans l’attente de nouvelles données, le Comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’EMEA et son groupe de travail Pharmacovigilance (PhVWP) recommandent d’éviter autant que possible l’utilisation concomitante d’un IPP et de clopidogrel. La notice du Plavix® sera adaptée dans ce sens. En présence de symptômes gastriques chez des patients sous clopidogrel, il est probablement préférable d’administrer un antihistaminique H2 ou un antacide.