Stents médicamenteux dans les syndromes coronariens aigus


Abstract

Les stents médicamenteux ou “ drug eluting stents ” ont été développés dans le but de réduire le risque de resténose. Des données récentes indiquent toutefois que les stents médicamenteux ne sont pas supérieurs aux stents coronariens classiques en termes de mortalité et d’infarctus du myocarde, et qu’ils comportent un risque plus élevé de thrombose tardive. Tenant compte en outre de leur prix beaucoup plus élevé, il est préférable, chez les patients avec un faible risque de resténose, d’opter plutôt pour un stent classique. Chez les patients avec un risque élevé de resténose et chez ceux atteints d’une affection coronarienne sévère, le recours à un pontage coronarien chirurgical semble être une meilleure option. La mise en place d’un stent médicamenteux est une alternative, mais elle implique un traitement antithrombotique prolongé.

La prise en charge des syndromes coronariens consiste généralement en un traitement médicamenteux antithrombotique [voir Folia de février 2004 , janvier 2008 et février 2009 ] associé à une angioplastie avec ou sans mise en place d’un stent ou à un pontage coronarien chirurgical. A côté des stents classiques en métal nu (“ bare metal stents ” ou BMS), des stents médicamenteux libérant des substances telles que le sirolimus ou le paclitaxel (“ drug eluting stents ” ou DES) ont été développés dans le but de réduire le risque de resténose. Ces stents médicamenteux sont cependant beaucoup plus onéreux que les stents classiques. La question se pose dès lors de savoir si ce surcoût est contrebalancé par le bénéfice clinique.


Stents médicamenteux versus stents classiques

Plusieurs études randomisées contrôlées et méta-analyses ont comparé l’efficacité des stents médicamenteux à celle des stents classiques. Il en ressort que les stents médicamenteux diminuent environ de moitié le risque de resténose (évalué par le nombre de reprises de revascularisation de l’artère initialement traitée pendant un suivi de 4 ans) par rapport aux stents classiques. Aucune différence statistiquement significative n’a cependant été observée en ce qui concerne la mortalité totale, la mortalité cardiaque et le risque d’infarctus du myocarde. Même chez les patients diabétiques chez lesquels le risque de resténose est élevé, les stents médicamenteux ne semblent pas avoir d’autres avantages que la diminution du risque de resténose. En outre, selon les données provenant de registres de patients, les différences des taux de resténose entre les stents médicamenteux et les stents classiques seraient moins prononcées que dans les études et les méta-analyses.

Par ailleurs, les données disponibles indiquent que les stents médicamenteux augmentent le risque de thrombose tardive (plus d’un an après la mise en place) par rapport aux stents classiques. Cet effet indésirable, rare mais potentiellement fatal, s’explique par le fait que le médicament retarde l’endothélisation. Il en résulte que lors de la mise en place d’un stent médicamenteux, le traitement antithrombotique par le clopidogrel et l’acide acétylsalicylique doit être poursuivi pendant au moins 12 mois (y compris en l’absence de syndrome coronarien aigu), avec le risque d’hémorragie que cela comporte. Après mise en place d’un stent classique et en l’absence d’un syndrome coronarien aigu, l’association de clopidogrel et d’acide acétylsalicylique ne doit être prise que pendant un mois; ce n’est qu’en présence d’un syndrome coronarien aigu que l’association devra être prise pendant 12 mois [voir Folia de janvier 2008 ].


Stents médicamenteux versus pontage coronarien chirurgical

L’étude SYNTAX a comparé l’efficacité d’un pontage coronarien chirurgical et d’une angioplastie avec mise en place d’un stent médicamenteux chez des patients atteints d’une affection coronarienne sévère (p. ex. maladie des trois vaisseaux coronaires ou atteinte du tronc coronaire gauche). Les résultats après 12 mois indiquent un risque moindre d’accidents cardiaques graves et d’accidents vasculaires cérébraux (critère d’évaluation primaire combiné) chez les patients ayant bénéficié d’un pontage chirurgical par rapport aux patients traités par angioplastie avec mise en place d’un stent médicamenteux. Le risque d’accident vasculaire cérébral (critère d’évaluation secondaire) était toutefois plus élevé dans le groupe traité par un pontage chirurgical.


Conclusion

Sur base de ces données, il est actuellement recommandé de limiter l’utilisation des stents médicamenteux, en tenant compte de leur rapport bénéfices-risques et de leur rapport coût-efficacité pour chaque patient en particulier. Chez les patients avec un faible risque de resténose (p.ex. les patients non diabétiques avec une lésion peu étendue au niveau d’un large vaisseau), ainsi que chez les patients avec un risque élevé d’hémorragie, on optera de préférence pour un stent classique. Chez les patients avec un risque élevé de resténose (p. ex. chez les patients diabétiques, en cas de lésion au niveau d’un vaisseau de petit diamètre, lésion étendue ou lésions multiples), un pontage coronarien chirurgical semble être une meilleure option. Chez ces patients avec un risque élevé de resténose, la mise en place d’un stent médicamenteux est une alternative, mais elle implique un traitement antithrombotique de longue durée (au moins un an) par l’association de clopidogrel et d’acide acétylsalicylique. Dans tous les cas, il est important de veiller à ce que le patient reçoive également un traitement médicamenteux optimal (antiagrégant, statine, et éventuellement un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine).


Références

Anonyme: Les etdoprothèses coronaires pharmaco-actives. La Revue Prescrire 2008; 28: 916-20

Bavry AA et Bhatt DL: Appropriate use of drug-eluting stetts: balancing the reduction in restetosis with the concern of late thrombosis. Lancet 2008; 371: 2134-43

Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE): Drug Eluting Stents en Belgique: Health Technology Assessment. KCE reports 66B (2007) via www.kce.fgov.be

Lange RA et Hillis LD.: Coronary Revascularization in context. N Engl J Med 2009; 360: 1024-6

Syntax investigators.: Percutanous coronary intervettion versus coronary-artery bypass grafting for severe coronary artery disease. N Engl J Med 2009; 360: 961-72