Pharmacovigilance: atteinte de la cornée et rétinopathie avec la chloroquine et l’hydroxychloroquine

La chloroquine (Nivaquine®) et l’hydroxychloroquine (Plaquenil®) sont utilisées pour la prévention et le traitement de la malaria; elles sont aussi utilisées dans le lupus érythémateux disséminé limité à la peau et aux articulations ainsi que dans la polyarthrite rhumatoïde [en ce qui concerne le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, voir aussi Folia de septembre 2011 ].

Le Centre Belge de Pharmacovigilance a été récemment informé de la survenue d’une rétinopathie chez deux patientes qui étaient traitées depuis plusieurs années par la chloroquine en raison d’une polyarthrite rhumatoïde.

La toxicité oculaire de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine, principalement l’atteinte de la cornée et la rétinopathie, est décrite depuis longtemps. En cas de traitement de longue durée, comme c’est le cas dans la polyarthrite rhumatoïde, la préférence est donnée à l’hydroxychloroquine plutôt qu’à la chloroquine, étant donné qu’ à dose équivalente, la toxicité oculaire de l’hydroxychloroquine est plus faible. L’atteinte de la cornée est réversible et est associée chez moins de 50% des patients à des plaintes (entre autres photophobie, troubles de l’accomodation). Par contre, la rétinopathie est parfois irréversible, et peut entraîner une réduction importante de la vision; les symptômes sont entre autres une diminution de la vision des couleurs, des scotomes, des scotomes scintillants et des difficultés de lecture.

Le risque de rétinopathie semble surtout augmenter à partir d’une dose journalière de 6,5 mg/kg de sulfate d’hydroxychloroquine ou de 2,5 mg/kg de chloroquine. Le risque augmente aussi en cas de traitement pendant plus de 5 ans, ainsi que chez les patients âgés, chez les patients atteints d’insuffisance rénale ou hépatique, en cas de rétinopathie préexistante et chez les patients obèses. La chloroquine et l’hydroxychloroquine ne diffusent pas dans le tissu adipeux. C’est pourquoi, le calcul de la dose sur base de poids corporel total pourrait entraîner un surdosage, certainement chez les patients obèses ou si l’on se rapproche de la dose maximale. Il est dès lors conseillé, certainement chez les patients obèses, de calculer la dose de chloroquine et d’hydrochloroquine en se basant sur le poids de masse maigre (lean body mass; il s’agit du poids corporel total diminué de la masse grasse corporelle, peut être calculé p. ex. via www.medcalc.com/body.html sur base du sexe, de la taille et du poids corporel).

Il est recommandé d’effectuer un examen ophtalmologique (cornée, fond d’oeil, champ visuel) avant d’instaurer le traitement, et ensuite régulièrement (selon le Résumé des Caractéristiques du Produit ou RCP, au moins tous les 6 mois pour la chloroquine, au moins tous les ans pour l’hydroxychloroquine, ou plus fréquemment en présence de facteurs de risque). En cas d’apparition d’une rétinopathie lors d’un traitement par l’hydroxychloroquine ou la chloroquine, celui-ci doit être immédiatement interrompu; les lésions peuvent néanmoins continuer à évoluer malgré l’arrêt du traitement.

Le risque de rétinopathie est extrêmement faible aux doses hebdomadaires de chloroquine utilisées dans le cadre de la prévention de la malaria. Référence utile: Arch Ophtalmol 2011; 129: 30-9 .