Confusion aiguë d’origine médicamenteuse chez la personne âgée


Abstract

La confusion aiguë chez la personne âgée est souvent associée à l’administration de médicaments. Ce sont surtout, mais pas exclusivement, les médicaments avec une action anticholinergique marquée qui posent problème. L’apparition d’une confusion aiguë est aussi souvent associée à l’intoxication ou au sevrage alcoolique, aux benzodiazépines ou aux opiacés. Outre le traitement causal, un traitement médicamenteux symptomatique est souvent nécessaire, par ex. par un neuroleptique, en cas de confusion avec agitation. Dans le sevrage alcoolique ou aux benzodiazépines, l’administration d’une benzodiazépine à durée d’action intermédiaire peut être utile.

La confusion aiguë d’origine médicamenteuse répond aux critères du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders IV (DSM-IV) suivants:

  • troubles de la conscience avec diminutio n de l’attention;
  • atteinte des fonctions cognitives ou apparition de troubles de la perception (par ex. des hallucinations);
  • apparition rapide des symptômes (en quelques heures à quelques jours) avec fluctuations au cours de la journée;
  • troubles dus aux conséquences physiologiques directes d’une affection somatique, d’une intoxication médicamenteuse ou d’un sevrage médicamenteux.

La confusion aiguë peut avoir une ou plusieurs causes organiques. Chez la personne âgée, la confusion aiguë est souvent associée à une infection (par ex. pneumonie, cystite), la prise de médicaments, une rétention urinaire, des troubles électrolytiques, des troubles de la fonction rénale ou hépatique, une intervention chirurgicale ou un traumatisme récent. Le sevrage alcoolique, aux benzodiazépines ou aux opiacés, ou au contraire une intoxication par ceux-ci sont aussi souvent responsables de confusion aiguë. Les principaux facteurs qui prédisposent à l’apparition d’une confusion aiguë sont l’âge avancé, la démence, la sous-alimentation, l’association de plusieurs médicaments, la contention physique ainsi que toute complication d’un acte diagnostique ou thérapeutique.


Etiologie médicamenteuse

Presque toutes les classes de médicaments peuvent provoquer une confusion aiguë chez des personnes vulnérables. Certains médicaments sont toutefois plus souvent impliqués; ceux avec une activité anticholinergique marquée doivent être utilisés avec prudence chez les personnes âgées.

Le tableau ci-dessous, extrait du Cecil Textbook of Medicine (21ème édition), reprend les principales classes de médicaments le plus souvent incriminées.


Médicaments avec des effets psychoactifs

  • Hypnotiques, sédatifs: benzodiazépines (surtout à longue durée d’action), barbituriques
  • Narcotiques
  • Médicaments avec une activité anticholinergique marquée: atropine, scopolamine, certains antihistaminiques H1, spasmolytiques, antidépresseurs tricycliques, neuroleptiques, antiparkinsoniens, [n.d.l.r.: et disopyramide]
  • Médicaments cardio-vasculaires: digitaliques, antiarythmiques (quinidine, procaïnamide, lidocaïne,), antihypertenseurs (β-bloquants, méthyldopa)
  • Médicaments gastro-intestinaux: antihistaminiques H2, métoclopramide
  • Divers: antiinflammatoires non stéroïdiens, corticostéroïdes, antiépileptiques, lithium

Traitement

La prise en charge de la confusion aiguë consiste avant tout à rechercher la cause et, si possible, à la traiter. [N.d.l.r.: Le médicament incriminé sera donc arrêté et il ne sera de préférence plus administré ultérieurement.] Outre une prise en charge non pharmacologique, un traitement médicamenteux symptomatique est aussi souvent nécessaire. Des études randomisées contrôlées sur le traitement de la confusion aiguë chez la personne âgée sont cependant rares, et les recommandations thérapeutiques suivantes reposent essentiellement sur l’expérience clinique.

  • L’administration d’un neuroleptique à faibles doses, tel l’ halopéridol (0,5 à 1 mg par voie orale ou parentérale toutes les 2 heures jusqu’à disparition des symptômes avec un max. de 10 mg/24 heures), est souvent préconisée. Comme tous les neuroleptiques, l’halopéridol peut provoquer des effets indésirables extrapyramidaux, ce qui nécessite une diminution de la posologie. Ses effets sédatifs, anticholinergiques et cardio-vasculaires sont par contre peu fréquents aux faibles doses préconisées. L’halopéridol peut entraîner un allongement de l’intervalle QT (effet dépendant de la dose) avec un risque d’arythmies pouvant être fatales. Si l’halopéridol n’est pas suffisamment efficace, une benzodiazépine à durée d’action intermédiaire, par ex. le lorazépam (0,5 à 1 mg par voie orale ou parentérale) ou l’ oxazépam (5 à 10 mg per os), peut être utilisée comme alternative ou en supplément.
  • En cas de confusion aiguë associée à une maladie de Parkinson, la première étape consiste à diminuer autant que possible la dose des antiparkinsoniens [n.d.l.r.: et à supprimer les anticholinergiques]. Si cela ne suffit pas, un traitement symptomatique peut s’avérer nécessaire. Les neuroleptiques classiques, tel l’halopéridol, sont contre-indiqués en raison du risque d’aggravation des symptômes parkinsoniens. La clozapine, un neuroleptique atypique, est le médicament le plus étudié dans le traitement de la confusion aiguë associée à la maladie de Parkinson, mais son utilisation requiert la plus grande prudence en raison du risque d’agranulocytose. [N.d.l.r.: les données concernant l’utilisation dans ces circonstances d’autres neuroleptiques atypiques sont limitées. Voir aussi Folia de décembre 2001 ].
  • En cas de confusion aiguë lors d’un sevrage alcoolique ou aux benzodiazépines, l’administration d’une benzodiazépine est recommandée. Le choix se porte souvent sur une benzodiazépine à durée d’action intermédiaire, par ex. le lorazépam qui présente un profil métabolique favorable dans cette situation et est bien résorbé après injection intramusculaire. Dans les cas graves, de faibles doses d’halopéridol peuvent éventuellement être ajoutées.

Dans tous les cas, le traitement donné sera interrompu progressivement après contrôle des symptômes.

D’après

  • E.J. van Melick en O.J. de Vries: Geneesmiddelen en ouderen: het delirium. Geneesmiddelenbulletin 36 : 73-76(2002)
  • T.M. Brown en M.F. Boyle:: Delirium. Brit Med J 325 : 644-647(2002)

Noms de spécialités


Clozapine: Leponex

Halopéridol: Haldol

Lorazépam: Calmamed Docloraze Lauracalm Lorazemed Lorazepam EG Lorazepam-Ratiopharm Lorazetop Loridem Serenase Temesta Vigiten

Oxazépam: Oxazepam Efeka Oxazepam EG Oxaphar Seresta Tranquo

Un allongement de l’intervalle QT, avec risque de torsades de pointes, peut survenir avec tous les neuroleptiques, surtout en cas de doses élevées et d’administration parentérale. Un Communiqué de la Pharmacovigilance paraîtra prochainement à ce sujet.