Communiqué du Centre de Pharmacovigilance
Effets à long terme de l’utilisation de diéthylstilbestrol (DES) pendant la grossesse

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Le diéthylstilbestrol (DES) est un estrogène synthétique, classé comme « perturbateur hormonal » (endocrine disruptor1). Entre les années ‘40 et ’70, le DES a été prescrit à des femmes enceintes en pensant que cela permettait de prévenir des fausses-couches. Déjà au cours des années ’50, il y avait des indications de la non efficacité du DES dans cette indication, ce qui fut confirmé ultérieurement. Au début des années ’70 il est apparu, sur base de rapports de cas et d’études de cohortes, que les filles de femmes traitées par le DES avaient un risque accru d’adénocarcinome à cellules claires (clear-cell adenocarcinoma) du vagin et du col et, dans les années qui ont suivi, le DES a été interdit dans la plupart des pays. Il est ressorti d’autres études de cohortes que l’exposition in utero au DES conduisait également à plusieurs autres risques, aussi bien chez les filles (anomalies au niveau de l’épithélium du vagin telles que adénose vaginale, ectropion cervical et problèmes de reproduction tels que avortements spontanés, grossesse extra-utérine, accouchement prématuré, légère diminution possible de la fertilité) que chez les fils (anomalies au niveau des testicules et de l’épididyme, probablement sans effet sur la fertilité). Plus récemment, sur base d’études de cohortes, il a été suggéré que les fils de femmes exposées in utero (donc les petits-fils de femmes traitées par le DES) ont un risque accru d’hypospadias, mais on ne dispose pas de preuves claires [voir Folia juin 2003 et février 2012].

Encore en 2016, les effets à long terme du DES continuent à justifier de l’attention. En effet, les anomalies chez les hommes et les femmes qui ont été exposés in utero surviennent parfois seulement après plusieurs décennies. Un suivi de trois études de cohortes (avec d’une part un groupe de femmes exposées in utero au DES, et d’autre part un groupe de femmes non exposées, suivis depuis les années ’70) a été publié en 2011. Les résultats renforcent le lien entre le DES et les risques décrits ci-dessus, et suggèrent aussi un risque accru d’autres complications liées à la grossesse telles que mortinaissance et mortalité néonatale, ménopause précoce, cancer du sein après l’âge de 40 ans et néoplasie intra-épithéliale du col de haut grade (CIN2 ou supérieur). Il est possible que de nouveaux risques de santé soient découverts dans le futur. Les petits-enfants de femmes qui ont pris du DES nécessiteront encore une attention accrue pendant des années.

Il reste important de signaler au centre de pharmacovigilance les effets dont on suspecte qu’ils pourraient avoir un lien avec le DES.

Le site du « DES centrum » aux Pays-Bas (www.descentrum.nl) fournit des informations utiles aux professionnels de la santé concernant le suivi des filles et fils du DES.
 

1 Des perturbateurs hormonaux sont des substances chimiques qui influencent négativement la régulation hormonale chez l’humain et l’animal.

Quelques références

  • “Les risques de l’exposition au diéthylstilbestrol (DES) in utéro”, brochure établie par les autorités belges de santé en 1995 (cliquer ici pour lire la version scannée). Cette brochure donne l’état des connaissances à l’époque. Les avis concernant le screening ou le traitement ne sont sans doute plus à jour.

  • Martindale, The Complete Drug Reference, version en ligne (consultée le 26/05/16).

  • Hoover R.N. et al. Adverse Health outcomes in women exposed in utero to diethylstilbestrol. N Engl J Med 2011;365:1304-14

  • Goodman A et al. The long term effects of in utero exposure – the DES story. N Engl J Med 2011;364:2083-4

  • Exposition au DES (Distilbène®) in utero. La Revue Prescrire 2013;33:566-8

  • Diéthylstilbestrol (DES) : effets nocifs sur la 3e génération aussi. La Revue Prescrire 2016;36:508-13