Sécheresse de la bouche: étiologie et prise en charge


Abstract

L’hyposialie ou la diminution de la sécrétion salivaire est une affection fréquente dont le principal symptôme est la sécheresse de la bouche (xérostomie). Cette affection est à l’origine de toutes sortes de problèmes oropharyngés, et comporte notamment un risque accru de caries et de candidose, de problèmes de déglutition ou de mastication, ainsi que de problèmes avec les prothèses dentaires. Tous ces problèmes supplémentaires peuvent avoir un impact négatif sur la qualité de vie. La xérostomie est plus fréquente chez les personnes âgées (incidence de 10 à 40%). Cet article discute de l’étiologie et de la prise en charge de l’hyposialie.


Etiologie

Les principales causes d’hyposialie sont: certains médicaments (voir plus loin), une radiothérapie de la tête et du cou [voir Folia de septembre 2001 ], et le syndrome de Sjögren. Ce syndrome se caractérise par une sécheresse de la bouche et des yeux; dans certains cas, il survient dans le contexte d’une maladie auto-immunitaire telle que la polyarthrite rhumatoïde. D’autres causes plus rares sont: l’angoisse et la dépression, un diabète de type 2 mal contrôlé, le SIDA, la maladie du greffon contre l’hôte (graft-versus-host disease) après une greffe de moelle osseuse. Une sécheresse de la bouche peut aussi apparaître en cas de déshydratation, en phase terminale de la vie ou en période post-opératoire.


Hyposialie d’origine médicamenteuse

Les médicaments à propriétés anticholinergiques sont la principale cause d’hyposialie. Il s’agit entre autres des anticholinergiques utilisés en cas de problèmes vésicaux, dans la maladie de Parkinson ou dans l’asthme et la BPCO (y compris les médicaments inhalés), de la plupart des antidépresseurs, de certains antihistaminiques H1 (surtout la prométhazine et la diphenhydramine), de certains antipsychotiques (les phénothiazines surtout), de l’atropine, du bromure de butylhyoscine, du disopyramide, de la carbamazépine et de l’oxcarbazépine.

D’autres médicaments pouvant être à l’origine d’une sécheresse de la bouche sont: les alpha-bloquants, les antitumoraux, les benzodiazépines, la bupropione, la clonidine, les diurétiques, la guanfacine, la méthyldopa, les morphiniques, les inhibiteurs de la pompe à protons, l’iode radioactif, la sibutramine, la tizanidine. Cette liste n’est pas exhaustive.

L’incidence élevée de la sécheresse buccale chez les personnes âgées s’explique par le fait qu’elles prennent souvent plusieurs médicaments (problème de la polymédication) et qu’elles sont en outre plus sensibles aux effets indésirables des médicaments.


Prise en charge

Lorsqu’une hyposialie apparaît comme effet indésirable d’un médicament, il convient dans la mesure du possible d’arrêter la prise du médicament en question, ou de passer éventuellement à un médicament avec un risque moindre d’hyposialie. Si l’arrêt du traitement médicamenteux est impossible, on peut tenter d’adapter le schéma posologique. On peut par exemple répartir la dose quotidienne sur plusieurs prises au lieu d’une seule, en évitant de préférence d’administrer une dose le soir vu que la sécrétion salivaire est la plus faible durant la nuit.

La prise en charge vise en outre à améliorer le confort du patient et à prevenir les complications orales.

  • Quelques mesures simples: boire régulièrement de l’eau pendant la journée, mâcher des gommes sans sucre, humidifier régulièrement la bouche. On évitera les boissons alcoolisées, le café, les aliments fort épicés et les bains de bouche à base d’alcool. Il est conseillé d’arrêter de fumer.
  • Différents substituts salivaires ou humidifiants buccaux, entre autres à base de carboxyméthylcellulose, d’hydroxyméthylcellulose ou de mucine, sont disponibles en pharmacie. Ces substances sont incorporées dans des gommes à mâcher, des solutions pour bains de bouche ou du dentifrice. Elles peuvent apporter un soulagement pendant une courte période. Les substituts salivaires et humidifiants buccaux sont pris de préférence juste avant le coucher ou avant que le patient ne doive prendre longuement la parole. Les données disponibles ne permettent pas de proposer un médicament en particulier comme premier choix.

    Les préparations suivantes sont disponibles en Belgique (situation au 10/11/2009).

    • Biotène®
      • Oral Balance Liquid
      • Oral Balance Gel
      • Bain de bouche
    • BioXtra®
      • Gel humectant
      • Gel-spray buccal
      • Bain de bouche sans alcool
      • Gommes à mâcher sans sucre
      • Pastilles à sucer
    • Glandosane® spray buccal
    • Evodry® spray buccal
    • Xialine®
      • Spray
      • Bain de bouche
  • Les cholinomimétiques tels que la pilocarpine stimulent la production salivaire et peuvent être utilisés dans le syndrome de Sjögren et en cas de radiothérapie de la tête et du cou. La pilocarpine n’est pas disponible en Belgique sous forme de spécialité à usage systémique, mais peut être prescrite sous forme de préparation magistrale (pilocarpine chlorhydrate 5 mg par capsule); un remboursement est prévu dans le cas du syndrome de Sjögren et en cas de radiothérapie de la tête et du cou. Concernant les modalités de remboursement, voir www.inami.fgov.be/drug/ fr/drugs/magisterial-preparations/pdf/annexe024.pdf (§15). Les effets indésirables liés à la stimulation cholinergique sont les suivants: nausées, vomissements, sudation, salivation, miction ou défécation involontaire, bronchospasme, bradycardie et hypotension.
  • On ne dispose pas de beaucoup de preuves concernant l’efficacité de l’anétholtrithione (Sulfarlem S25®), utilisée en cas d’insuffisance salivaire iatrogène.
  • Pour prévenir les caries, une bonne hygiène buccale est évidemment importante [voir Folia de juin 2009 : "Le fluorure en prévention des caries"].

Quelques références

Guggenheimer J et Moore PA.: Xerostomia. Etiology, recognition and treatment. J Am Dent Assoc 2003; 134: 61-9

Gupta A, Epstein JB et Sroussi H.: Hyposalivation in elderly patients. J Can Dent Assoc 2006; 72: 841-6

Turner MD et Ship JA.: Dry mouth and its effects on the oral health of elderly people J Am Dent Assoc 2007; 138: 15S-20S