Eté, voyages et médicaments: mise à jour

Le thème "Eté, voyages et médicaments" a déjà été discuté dans les Folia de mai 2001 mai 2004 et mai 2005 . Certains sujets déjà abordés dans ces Folia sont actualisés dans cet article, et quelques sujets supplémentaires y sont également discutés. A ce sujet, nous signalons que la fiche de Transparence "Rhume des foins" est jointe à ce numéro des Folia.


Exposition au soleil et médicaments


Photodermatoses d’origine médicamenteuse

Les photodermatoses ont déjà été discutées dans les Folia de juin 2000 . Il s’agit de réactions cutanées phototoxiques et photoallergiques qui surviennent après administration systémique ou locale d’un médicament suite à une exposition au soleil ou aux rayons UV. Les principaux médicaments responsables de photo-dermatoses mentionnés dans cet article sont: l’amiodarone, les quinolones, les phénothiazines, la quinine, les diurétiques de l’anse, le méthotrexate, les psoralènes, les tétracyclines (probablement surtout la doxycycline), les sulfamidés (antibactériens et hypoglycémiants), les thiazides; les AINS sont également cités.

  • Les AINS administrés par voie systémique peuvent provoquer des photo-dermatoses (surtout de type phototoxique). Des réactions sont fréquemment décrites avec le piroxicam; des photodermatoses sont aussi souvent rapportées avec d’autres AINS tels le naproxène, le sulindac, le diclofénac et le diflunisal, mais cela est peut-être en relation avec leur fréquence d’utilisation.
  • Qu’en est-il des AINS appliqués localement? Il est suggéré que les photo-dermatoses apparaissent plus fréquemment lors de l’application locale d’AINS que lors de leur administration systémique, et que parmi les AINS à usage local, le kétoprofène (Fastum®) provoque le plus de problèmes, surtout de type photoallergique. Deux publications récentes de dermatologues belges attirent l’attention sur le risque de réactions photoallergiques après application locale de kétoprofène; ces dermatologues ont constaté une augmentation de l’incidence de ces réactions ces dernières années [ Tijdschr voor Geneeskd 2006; 62: 375-80 et : 381-4]. Il s’agit surtout de réactions eczématiformes, avec parfois des réactions bulleuses importantes, un oedème et un érythème, nécessitant dans certains cas un traitement par des corticostéroïdes. L’éruption apparaît d’abord au site d’application, mais s’étend parfois à l’ensemble du corps. Les lésions cutanées peuvent persister longtemps. De nouvelles éruptions peuvent encore survenir après une exposition au soleil plusieurs semaines à un an après l’arrêt du kétoprofène (photosensibilité prolongée). En raison de leur ressemblance chimique, une hypersensibilité croisée peut survenir entre le kétoprofène d’une part, et le fénofibrate, l’amiodarone et des filtres solaires de la classe des benzophénones d’autre part; avec l’ibuprofène et le naproxène, il n’existe en principe pas d’allergie croisée. Il faut toutefois signaler que chez les patients atteints de photoallergie, une hypersensibilité croisée peut aussi survenir avec des substances non apparentées. Les dermatologues recommandent dans l’article d’éviter l’application locale de kétoprofène, certainement au printemps et en été. Il faut être conscient que lorsqu’une sensibilisation est survenue après une application locale, des problèmes peuvent aussi survenir lors de l’administration de l’AINS par voie systémique, et inversément.

Application locale de tacrolimus et de pimécrolimus, et risque de cancer

Le tacrolimus (Protopic®) et le pimécrolimus (Elidel®), des immunosuppresseurs appliqués localement, sont utilisés chez des patients atteints de dermatite atopique (à partir de l’âge de 2 ans) lorsque les corticostéroïdes ne sont pas suffisamment efficaces ou ne sont pas supportés [ Folia de novembre 2003 ]. Avec ces médicaments, une augmentation du risque de cancer cutané et de lymphomes ne peut être exclue; à ce propos, voir Folia de april 2005 concernant les avertissements de la Food and Drug Administration américaine, et le communiqué de presse du 27 mars 2006 de l’Agence Européenne des Médicaments (via www.emea.eu.int ), ainsi que les communiqués des 27 et 30 mars 2006 sur le site web de la direction générale Médicaments (via www.health.fgov.be , cliquez sur "Médicaments"). En raison de leur effet immunosuppresseur, le tacrolimus et le pimécrolimus pourraient augmenter le risque de tumeurs induites par les rayons UV. Bien qu’un tel effet n’ait pas été prouvé, l’attention est attirée dans la notice de ces médicaments sur la nécessité d’une protection suffisante contre les rayons UV lors de l’application de ces médicaments: exposition au soleil minimale, emploi de filtres solaires, protéger la peau par des vêtements couvrants, éviter la thérapie PUVA, les rayons UV-B ou UV d’un banc solaire. Une crème solaire avec un indice de protection élevé contre les rayons UV-A et UV-B peut être utilisée, et son application doit se faire après celle du pimécrolimus ou du tacrolimus. [Concernant les crèmes solaires, voir aussi Folia de juin 2000, mai 2004 , mai 2005 ].


Prise en charge du diabète lors de voyages

Entreprendre un long voyage peut parfois occasionner des problèmes chez les patients diabétiques, surtout ceux insulino-dépendants. Il est dès lors important de prendre un certain nombre de précautions.

L’adaptation du traitement hypoglycémiant est surtout nécessaire en cas de décalage horaire.

  • Les patients traités par quatre injections d’insuline par jour ("schéma basal-prandial", c.-à-d. une injection d’une insuline à longue durée d’action en principe le soir, et 3 injections d’une insuline à courte durée d’action avant chaque repas) peuvent facilement adapter leur schéma à l’heure locale: avant chaque repas, une injection d’une insuline à courte durée d’action, tandis que l’insuline à longue durée d’action est administrée avant le coucher au lieu de destination. Si le patient voyage vers l’ouest, cela signifie concrètement qu’il y aura un repas supplémentaire, et donc une injection supplémentaire d’une insuline à courte durée d’action. Si le patient voyage vers l’est, un repas sera supprimé.

    Chez les patients traités par deux injections d’une association d’insulines, une injection supplémentaire d’insuline peut être administrée en cas de voyage vers l’ouest afin de compenser le prolongement de la journée, mais cependant à une plus faible dose (p.ex. la moitié de la dose initiale). Une autre possibilité est de passer à un schéma basal-prandial.

  • La dose des sulfamidés hypoglycémiants, de la metformine et des glitazones ne doit généralement pas être adaptée.
  • Lors d’un voyage en avion, il est préférable de viser un contrôle un peu moins strict de la glycémie afin d’éviter une hypoglycémie.

Lors de voyage lointain en avion, il est important de disposer d’une réserve suffisante d’hydrates de carbone, d’insuline (à conserver au frais), de seringues ou de stylos, et de tigettes pour déterminer la glycémie et les corps cétoniques. La glycémie doit être contrôlée au moins toutes les 4 à 6 heures. Il est recommandé, lors d’un voyage en avion, de garder les médicaments et les accessoires dans le bagage à main.

Dans les pays tropicaux, le transport et la conservation de l’insuline peut poser des problèmes, et il est recommandé de conserver celle-ci au frais (température d’un réfrigérateur).

Les voyageurs doivent aussi savoir que l’insuline est résorbée plus rapidement lorsqu’il fait chaud ou après un effort physique, ce qui comporte un risque d’hypoglycémie.

Il est généralement recommandé d’emmener une réserve suffisante d’insuline pour la durée du voyage. Si l’on est quand même amené à acheter de l’insuline à l’étranger, il convient de tenir compte des informations suivantes.

  • Dans certains pays, on utilise des conditionnements à 40 UI/ml d’insuline, et non des conditionnements à 100 UI/ml comme en Belgique.
  • Il est préférable de s’informer au préalable auprès de la firme responsable quant à la disponibilité à l’étranger d’une insuline déterminée.
  • Lorsque l’on achète de l’insuline à l’étranger, il est préférable de se procurer également les seringues, afin d’être sûr d’administrer la quantité exacte d’unités.
  • Il est utile d’avoir avec soi une prescription de l’insuline à utiliser.

[ Drug Ther Bull 2005; 43: 73-7 Revue Médicale Suisse, numéro de mai 2005, via http://www.revmed.ch/ ; site web de la Vlaamse Diabetes Vereniging www.diabetes-vdv.be (terme de recherche: reizen); site web de l’Association Belge du Diabète www.diabete-abd.be (terme de recherche: voyage)]


Infections transmises par des tiques

La maladie de Lyme, causée par les spirochètes du groupe Borrelia burgdorferi sensu lato et transmise par des tiques, a déjà été discutée à plusieurs reprises dans les Folia [voir Folia de mai 2002 , mai 2003 et de mai 2004 ]. L’attention était attirée sur le fait que des tiques peuvent également transmettre d’autres pathogènes, p. ex. des flavivirus qui peuvent provoquer une encéphalite à tiques ("tick-born encephalitis"). L’Institut Scientifique Santé Publique belge a constaté depuis 2004 une augmentation du nombre de cas d’anaplasmose, une infection provoquée par la bactérie Anaplasma phagocytophilium et également transmise par des tiques. Comme la maladie de Lyme, le risque de transmission augmente d’autant plus que le tique reste longtemps dans la peau (surtout après plus de 36 à 48 heures). Les symptômes d’anaplasmose sont comparables à ceux d’un syndrome grippal (forte fièvre, céphalées, douleurs musculaires et articulaires, rarement éruptions cutanées), environ 10 jours après la piqûre; une leuco-pénie, une thrombopénie et une élévation modérée des enzymes hépatiques sont également souvent observées. Il n’existe pas de tests sérologiques en routine, et le diagnostic ne peut être confirmé que par le "Research Laboratory for Vector-borne Diseases" (laboratoire de référence de l’Hôpital Militaire Reine Astrid, www.smd.be/rlvbd . En 2005, ce laboratoire de référence a diagnostiqué 66 cas, mais étant donné que la maladie n’est pas bien connue et que le diagnostic ne peut se faire qu’à cet endroit, l’incidence est probablement sous-estimée. Le patient se rétablit souvent spontanément, mais dans de rares cas, la situation peut être grave. La doxycycline est efficace (c’est aussi le premier choix dans la borreliose de Lyme), et peut être administrée en présence de symptômes suggestifs d’une anaplasmose, certainement lorsque des anomalies hématologiques et hépatiques sont également présentes. Chez les enfants et les femmes enceintes, la rifampicine est recommandée, mais cela ne repose que sur peu de preuves. Il convient néanmoins, comme dans la maladie de Lyme [voir articles antérieurs dans les Folia], de ne pas débuter une antibiothérapie systématiquement, en absence de symptômes, après une piqûre de tique.

[Epi-Scoop, Wetenschappelijk Instituut Volksgezondheid, juin 2005, via www.iph.fgov.be/epidemio/epinl/episcooop/200502nl.pdf ].


Traitement des morsures de vipères

Le Brit Med J [2005; 331: 1244-7] a publié un article sur le traitement des morsures de vipères et d’autres serpents exotiques venimeux. Une attention particulière est accordée à la vipère péliade (Vipera berus), qui se rencontre encore en Belgique dans la Campine anversoise et dans le bassin de la haute Meuse. Les morsures de vipères sont très rares en Belgique. Les premiers soins consistent à contrôler la douleur, à immobiliser le patient (certainement le membre atteint), à traiter d’éventuelles réactions anaphylactiques et à hospitaliser le patient. Il faut être conscient qu’une réaction anaphylactique peut survenir très rapidement, et qu’une solution d’épinéphrine devrait être disponible sur place; cela pourrait être organisé par ex. lors de camps de jeunes dans des régions à risque. Dans certains cas (p. ex. en présence de symptômes généraux graves), l’administration d’un antisérum peut s’avérer nécessaire. En Belgique, le Centre Antipoison dispose du Viperfav®, plus d’information via www.poisoncentre.be , cliquez sur "Professionnels de la santé" et "la vipère péliade".

Des informations utiles sur les morsures de vipères, d’araignées et de scorpions sont également disponibles via www.itg.be/itg/DistanceLearning/LectureNotes VandenEndenE/index.htm .


Sites web utiles

Pour les sites web utiles, nous renvoyons aux Folia de mai 2005 . Une correction doit toutefois être apportée: le site web de la dernière version du "Yellow book" du "Centers for disease control and Prevention" (édition 2005-2006) est www2.ncid.cdc.gov/travel/yb/utils/ybBrowseO.asp .