Ces dernières années, plusieurs nouveaux antimigraineux ont été commercialisés en Belgique ; ils peuvent tous être regroupés sous le terme d’anti-CGRP. Ils ciblent soit le CGRP (calcitonin gene-related peptide), soit son récepteur.  L’érénumab, le frémanezumab et le galcanézumab sont des anticorps monoclonaux injectables utilisés dans la prophylaxie de la migraine. Le rimégépant est utilisé par voie orale et indiqué en prophylaxie mais aussi pour le traitement des crises de migraine.

Un article récent de La Revue Prescrire1 attire l’attention sur l’observation de cas d’alopécie avec les anti-CGRP. Un effet vasoconstricteur a été avancé comme mécanisme en cause.

  • La Revue Prescrire fait référence à une publication américaine comportant deux rapports de cas d’ alopécie survenue après utilisation d’érénumab (70 mg par mois en sous-cutané). Il s’agit de deux femmes de 69 et 33 ans chez qui l’alopécie est respectivement apparue 3 mois et 2 semaines après le début de l’exposition. Dans un cas, l’alopécie a régressé à l’arrêt du traitement et est réapparue lors de la prise de frémanezumab.

  • La Revue Prescrire fait aussi référence à une étude à partir de la base de données américaine FAERS (FDA) contenant les notifications spontanées d’effets indésirables aux Etats-Unis avec tous les médicaments qui y sont disponibles. Une proportion plus importante de notifications d’alopécie a été observée avec tous les anti-CGRP, par comparaison avec les notifications d’alopécie reçues pour l’ensemble des autres médicaments de la base de données FAERS2. On parle de signal de disproportionalité, ce qui signifie que l’effet indésirable pourrait être associé à la prise du médicament.

    • Les anti-CGRP ont été repris comme médicaments suspectés dans 55 994 rapports d’effets indésirables, incluant 1 827 rapports d’alopécie (3,26%) (FAERS consulté la dernière fois en août 2022). Par comparaison avec tous les autres médicaments repris dans la base de données FAERS, les cas d’alopécie étaient 4 fois plus nombreux avec l’ensemble des anti-CGRP (PRR 4,06 ; IC à 95% de 3,88 à 4,25). Le PRR (proportional reporting ratio) est, pour un effet indésirable donné, la proportion de rapports pour un médicament donné, divisée par la proportion correspondante pour l’ensemble des médicaments.
    • Pour le rimégépant dont l’expérience d’utilisation aux Etats-Unis est encore limitée, la FDA a reçu 26 notifications d’alopécie en 2022.

Le Centre Belge de Pharmacovigilance a reçu, depuis 2019, 20 notifications d’alopécie avec des anti-CGRP : érénumab (n=10), galcanézumab (n=6), frémanezumab, (n=4) ; âge moyen : 35 ans ; uniquement des femmes. Dans la plupart des cas, l’évolution était inconnue (n=11) ou il n’y avait pas d’amélioration au moment de la notification (n=6 ). Dans deux cas, une amélioration a été constatée à l’arrêt du traitement ; dans un cas, le traitement se poursuivait au moment de la notification. Le Centre n’a reçu aucune notification avec le rimégépant (situation au 01/10/2023), mais ce médicament a été commercialisé plus récemment que les 3 autres anti-CGRP.

Vu le nombre limité de cas d’alopécie rapportés et le fait que d’autres causes pourraient expliquer ces cas rapportés, des études sont nécessaires pour confirmer ce risque.

En pratique, si vous constatez une alopécie chez un patient traité par un anti-CGRP, il faut, parmi les causes possibles, envisager le rôle de l’anti-CGRP ou d’un autre médicament [voir aussi Folia juillet 2016 concernant alopécie et médicaments].

Sources spécifiques :

Erénumab et autres anti-CGRP : alopécies. La Revue Prescrire 2023 ; 43 : 587
Alopecie as an emerging adverse event to CGRP monoclonal antibodies: Cases Series, evaluation of FAERS, and literature review. Cephalalgia 2023;43(2):3331024221143538. doi: 10.1177/03331024221143538.

Noms des spécialités concernées :