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Certains progestatifs ont été associés à un risque accru de méningiome, une tumeur bénigne intracrânienne ou intrarachidienne qui, par compression, peut engendrer des symptômes tels que maux de tête, troubles visuels et crises d’épilepsie, ou compression médullaire (si le méningiome est intrarachidien).1, 2 Un possible lien entre les hormones sexuelles et les méningiomes est connu depuis longtemps.
Suite à l’évaluation par le comité européen de pharmacovigilance (PRAC) du risque de méningiome avec la cyprotérone, la chlormadinone et le nomégestrol, l’agence européenne des médicaments (EMA) a pris un certain nombre de mesures de minimisation de risques pour la cyprotérone (en 20205) et pour la chlormadinone et le nomégestrol (en 20226). Ces mesures de minimisation de risques font suite à l’évaluation de toutes les données post-marketing, y compris trois études de cohorte rétrospectives réalisées avec les données de l’assurance maladie française et effectuées sous les auspices de l’agence française des médicaments (ANSM).3, 4, 7
Le risque de méningiome est connu depuis longtemps avec l’acétate de cyprotérone, un progestatif avec des propriétés antiandrogènes utilisé chez la femme en cas d’hyperandrogénisme modéré à sévère (seul ou en association avec l’éthinylestradiol), et comme contraceptif (en association avec l’éthinylestradiol) chez des femmes en cas d’hirsutisme ou d’acné résistante au traitement topique ou antibiotique ; chez l’homme, il est utilisé en cas de cancer de la prostate et d’hypersexualité.
Suite à l’évaluation du risque de méningiome, l’EMA5 a conclu que globalement, cet effet indésirable est rare (entre une et dix personnes sur 10 000) et augmente avec la dose cumulée. La plupart des cas de méningiome ont été rapportés après un usage prolongé (plusieurs années) de doses élevées de cyprotérone (25 mg par jour ou plus).
Les mesures de minimisation de risques suivantes ont été prises.
Pour les dosages de 1 mg (non commercialisé en Belgique) et de 2 mg de cyprotérone (en association avec l’éthinylestradiol) : contre-indication en cas de méningiome ou d’antécédents de méningiome. Cette contre-indication existait déjà auparavant pour les dosages plus élevés.
Pour les dosages de 10 mg et de 50 mg de cyprotérone : utilisation pour les symptômes d'androgénisation chez la femme seulement lorsque l’utilisation de médicaments à base de cyprotérone à plus faible dose ou d'autres options de traitement n'a pas permis d’obtenir des résultats satisfaisants. Après amélioration clinique, diminuer progressivement la dose jusqu’à la dose efficace la plus faible. Utilisation en cas d’hypersexualité chez l’homme uniquement lorsque d’autres traitements ne peuvent pas être utilisés. L’indication pour le cancer de la prostate n’a pas été modifiée.
Pour tous les dosages: être attentif aux symptômes de méningiome (pouvant inclure troubles de la vision, perte auditive ou acouphènes, perte d’odorat, céphalées s’aggravant, pertes de mémoire, convulsions ou faiblesse des extrémités) et arrêter le traitement définitivement si un méningiome est constaté.
La chlormadinone (à 2 mg) et le nomégestrol (à 2,5 mg) sont, respectivement en association avec l’éthinylestradiol et l’estradiol, utilisés comme contraceptifs oraux. Le nomégestrol (à 5 mg) est utilisé chez les femmes non ménopausées dans les troubles menstruels associés à une production insuffisante ou nulle de progestérone et, en association avec un estrogène chez les femmes non hystérectomisées, comme traitement hormonal substitutif chez la femme ménopausée.
Suite à l’évaluation du risque de méningiome associé à la chlormadinone et au nomégestrol, l’EMA6 a conclu que cet effet indésirable est très rare et augmente avec la dose cumulée. La plupart des cas de méningiome ont été rapportés après un usage prolongé de doses élevées.
Les mesures de minimisation de risques suivantes ont été prises.
Pour les médicaments contenant du nomégestrol à forte dose (3,75 - 5 mg) ou de la chlormadinone à forte dose (5-10 mg ; non disponible en Belgique) : utilisation à la dose efficace la plus faible, pendant la durée la plus courte possible et uniquement lorsque d'autres interventions ne sont pas adaptées.
Pour tous les médicaments à base de nomégestrol ou de chlormadinone : contre-indication en cas de méningiome ou d’antécédents de méningiome. Être attentif aux symptômes de méningiome (voir ci-dessus) et arrêter le traitement définitivement si un méningiome est constaté.
Des données suggèrent que le risque de méningiome existe aussi avec d’autres progestatifs, seuls ou associés à un estrogène, dans le traitement hormonal substitutif.8 Une recherche dans la base de données européenne de pharmacovigilance (EudraVigilance) des médicaments pour lesquels on a notifié l’effet indésirable « méningiome » a montré que la grande majorité des rapports concerne la cyprotérone, la chlormadinone ou le nomégestrol. Quelques cas ont aussi été rapportés avec d’autres progestatifs (surtout lévonorgestrel en implant) et avec des associations estroprogestatives à visée contraceptive ou comme traitement hormonal substitutif.
Ces données concernant le risque de méningiome confirment l’importance de réévaluer régulièrement un traitement par cyprotérone, nomégestrol ou chlormadinone (seul ou en association avec un estrogène) et d’être attentif à tout signe évocateur d’un méningiome (voir plus haut). Le risque n’est pas clair pour les autres progestatifs.
1 Progestatifs et méningiomes intracrâniens. La Revue Prescrire 2014 ; 34 : 834
2 Progestatifs : méningiomes (suite). La Revue Prescrire 2018 ;38 :911
3 Nguyen P et al. (2021) - EPI-PHARE - Groupement d’intérêt scientifique (GIS) ANSM-CNAM “Utilisation prolongée de l’acétate de nomégestrol et risque de méningiome intracrânien : une étude de cohorte à partir des données du SNDS”. Beschikbaar via: https://www.epi-phare.fr/app/uploads/2021/04/epi-phare_rapport_acetate_nomegetrol_avril-2021.pdf
4 Nguyen P et al. (2021) - EPI-PHARE - Groupement d’intérêt scientifique (GIS) ANSM-CNAM “Utilisation prolongée de l’acétate de chlormadinone et risque de méningiome intracrânien : une étude de cohorte à partir des données du SNDS”. Beschikbaar via: https://www.epi-phare.fr/app/uploads/2021/04/epi-phare_rapport_acetate_chlormadinone_avril-2021-1.pdf
5 EMA. Referrals. Cyproterone-containing medicinal products. (first published 27/03/2020; last update 20/05/2020)
6 EMA. Referrals. Nomegestrol and chlormadinone. (first published 02/09/22)
7 Weill A, Nguyen P et al. Use of high dose cyproterone acetate and risk of intracranial meningioma in women: cohort study. BMJ 2021;372:n37 (doi: 10.1136/bmj.n37)
8 Traitement hormonal substitutif de la ménopause et méningiomes. La Revue Prescrire 2010 ; 30 ; 118