Introduction
Un article de la Revue Prescrire publié en janvier 2025 s’est intéressé aux avortements spontanés du premier trimestre d’origine médicamenteuse.1 Nous avons élargi cette liste sur base de nos sources et des médicaments disponibles en Belgique (voir Note plus bas).
Avortement spontané
Par définition, un avortement spontané, ou fausse couche, est une perte involontaire et spontanée d’une grossesse avant 24 semaines révolues. Les symptômes comprennent des saignements, des douleurs pelviennes ou abdominales et la disparition des symptômes de début de grossesse.
Dans le présent article, nous nous concentrons uniquement sur les avortements spontanés du premier trimestre, dits précoces, qui surviennent avant la 14ème semaine d’aménorrhée.
Facteurs de survenue
Un avortement spontané survient dans environ un tiers des grossesses.
Les principaux facteurs de survenue sont : un âge maternel élevé, une anomalie fœtale, une malformation utérine, une infection maternelle, une thrombophilie maternelle.
D’autres facteurs de risque moins importants sont également identifiables : des antécédents de fausse couche, une anomalie chromosomique parentale, une infertilité ou une conception assistée, la consommation d’alcool ou de tabac, le surpoids/obésité, une dysfonction thyroïdienne et le diabète.2
Cependant, en pratique, la cause directe d’un avortement spontané n’est pas toujours mise en évidence.1 Il est donc très difficile de prouver que le cause d’un avortement est médicamenteuse.
Médicaments qui augmentent le risque d’avortements spontanés au premier trimestre
Les médicaments cités par la Revue Prescrire qui augmentent le risque d’avortements spontanés au premier trimestre sont classés en différentes catégories (voir Note plus bas) :
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Les médicaments tératogènes avec un risque de fausse couche avéré ;
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Les rétinoïdes : isotrétinoïne et acitrétine et le rétinol ;
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Un immunosuppresseur : l’acide mycophénolique ;
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Un antiépileptique : l’acide valproïque ;
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Les antagonistes de la vitamine K : acénocoumarol, phenprocoumone, warfarine ;
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Un inhibiteur de la sécrétion gastrique : le misoprostol ;
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Un antibiotique : l’association du sulfaméthoxazole et du triméthoprime (effet fortement suspecté) ;
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Un antimycotique : le fluconazole (doses élevées) (effet fortement suspecté) ;
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Les antitumoraux : pour la plupart des antitumoraux, il existe des preuves ou des suspicions d’un effet nocif sur l’enfant à naître (effets tératogènes et mutagènes, embryotoxicité) ou d’une diminution de la fertilité. C’est particulièrement le cas pour certains agents alkylants, antimétabolites et anthracyclines, pour la trétinoïne et pour le thalidomide et ses analogues, le lénalidomide et le pomalidomide. Pour les produits introduits plus récemment (p.ex. les inhibiteurs de protéines kinases, les anticorps monoclonaux), il y a moins ou pas d’expérience chez l’homme. En principe, tous les antitumoraux sont donc contre-indiqués pendant la grossesse et on tentera en tout cas d’éviter l’administration pendant le premier trimestre (voir 13. Médicaments antitumoraux).
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Les médicaments tératogènes avec un risque associé très probable de fausse couche ;
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Un stabilisateur de l’humeur : le lithium ;
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Des antiépileptiques : la primidone, le phénobarbital, la carbamazépine, la phénytoïne, le topiramate et l’éthosuximide (effet tératogène fortement suspecté) ;
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Un vasoconstricteur : la pseudoéphédrine (effet tératogène suspecté) ;
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Un uricosurique : l’allopurinol (effet tératogène fortement suspecté) ;
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Un antiparasitaire : la pyriméthamine (effet tératogène chez l’animal).
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Les médicaments qui interfèrent avec l’implantation utérine de l’embryon ;
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Les médicaments qui ont un effet inhibiteur des prostaglandines comme les antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS) à dose antalgique.
Une étude a en effet mis en évidence une augmentation des fausses couches. Cependant, il existait un risque de biais d’indication. Dès lors, ces résultats doivent être confirmés.4,5
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Les médicaments qui induisent des contractions utérines ;
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Analogues des prostaglandines utilisés en ophtalmologie : bimatoprost, latanoprost, tafluprost et travoprost ;
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Analogue de prostaglandines utilisée comme inhibiteur de la sécrétion gastrique et comme inducteur de l’accouchement : misoprostol ;
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Analogue de prostaglandines utilisée comme comme inducteurs de l’accouchement : carboprost et dinoprostone ;
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Les oxytociques : l’oxytocine et la carbétocine ;
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Un dérivé de l’ergot : methylergométrine ;
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Les dispositifs intra-utérins maintenus en place alors qu’une grossesse est en cours.
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Note
Pour réaliser cette liste, nous nous sommes appuyés sur l’article de la revue Prescrire, dont nous avons élargi le contenu selon notre propre méthodologie (voir 2.6. La rubrique « Grossesse et allaitement »).
Concernant le risque tératogène, nous distinguons deux catégories de médicaments tératogènes selon leur lien avec le risque de fausse couche :
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Les médicaments tératogènes avec un risque de fausse couche avéré : médicaments pour lesquels nos sources (Lareb, CRAT, Briggs) mentionnent explicitement un risque d’avortement spontané.
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Les médicaments tératogènes avec un risque associé très probable de fausse couche : médicaments tératogènes pour lesquels le risque de fausse couche n’est pas clairement indiqué dans les sources, mais qui, en raison de leur potentiel d’anomalies embryonnaires majeures, peuvent raisonnablement être associés à un risque accru d’avortement spontané.
Les médicaments qui ne sont pas commercialisés en Belgique ne sont pas repris dans cette liste. En ce qui concerne les médicaments récemment commercialisés (possédant un « triangle noir » (▼) (voir Intro 6.2.1. Pharmacovigiliance)), il n’est pas toujours possible de se prononcer quant à leur effet tératogène potentiel, ils n’ont donc pas été repris dans cette liste.
Noms de spécialités :
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Acénocoumarol : Sintrom® (voir Répertoire).
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Acide mycophénolique : Cellcept®, Mycophenolat Mofetil(e), Myfenax®, Myfortic® (voir Répertoire).
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Acide valproïque : Depakine®, Valproate(e) (voir Répertoire).
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Acitrétine : Neotigason® (voir Répertoire).
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Allopurinol : Allopurinol(e), Zyloric® (voir Répertoire).
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Bimatoprost : Bimatoprost(e), Lumigan® (voir Répertoire).
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Carbamazépine : Tegretol® (voir Répertoire).
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Ethosuximide : Zarontin® (voir Répertoire).
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Fluconazole : Diflucan®, Fluconazol(e) (voir Répertoire).
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Isotrétinoïne : Isocural®, Isosupra®, Isotiorga®, Isotretinoin(e), Roaccutane® (voir Répertoire).
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Latanoprost : Latanoprost(e), Latanotears®, Monoprost®, Vizilatan®, Xalatan®, Xalof® (voir Répertoire).
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Lithium : Camcolit® (voir Répertoire).
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Misoprostol : Angusta®, Arthotec®, Cytotec® (voir Répertoire).
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Oxytociques : Carbetocin(e), Oxytocin(e), Syntocinon®, Pabal® (voir Répertoire).
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Phénobarbital : Gardenal®, Phenobarbital Sodium Sterop® (voir Répertoire).
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Phenprocoumone : Marcoumar® (voir Répertoire).
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Phénytoïne : Diphantoine® (voir Répertoire).
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Primidone : Mysoline® (voir Répertoire).
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Pseudoéphédrine (seule ou en association) : Aerinaze(e), Cirrus®, Clarinase®, Rhinosinutab®, Sinutab®, Vasocedine Pseudoephedrine®.
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Pyriméthamine : Daraprim ® (voir Répertoire).
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Sulfaméthoxazole + triméthoprime (co-trimoxazole) : Bactrim® (voir Répertoire).
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Tafluprost : Saflutan® (voir Répertoire).
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Topiramate : Topamax, Topiramat(e) (voir Répertoire).
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Travoprost : Travatan®, Travoprost(e), Vizitrav® (voir Répertoire).
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Warfarine : Marevan® (voir Répertoire).
Sources
1 Prescrire, Avortements spontanés du premier trimestre d’origine médicamenteuse, 45 (495) : 31-32.
2 BMJ Best Practice, Miscarriage> History and exam, consulté le 25/03/2025.
3 Dynamed, First Trimester Pregnancy Loss, consulté le 25/03/2025.
4 Bijwerkingencentrum Lareb, consulté le 16/04/2025.
5 Le Centre de Référence sur les Agents Tératogènes, Le CRAT, consulté le 16/04/2025.
6 Briggs Drugs in Pregnancy and Lactation, consulté le 16/04/2025.