Dépression chez l’adulte: une recommandation de bonne pratique médicale et une méta-analyse

Le présent article des Folia est consacré à la prise en charge de la dépression chez l’adulte. En premier lieu est abordée la recommandation de bonne pratique médicale "La dépression chez l’adulte" (2017, Domus Medica, traduit par la SSMG)1,2 : cette directive recommande d’éviter l’administration systématique d’antidépresseurs dans la "dépression légère à modérée" ; en cas de dépression sévère, il est recommandé d’administrer un antidépresseur, en accordant toujours une place importante au soutien psychologique. Dans un deuxième temps, l’article discute de la méta-analyse parue dans The Lancet: on y conclut que, dans les études randomisées sur la dépression majeure sévère chez l’adulte, les antidépresseurs s’avèrent supérieurs au placebo3,4.

Une recommandation de bonne pratique médicale1

Résumé

Cette recommandation de bonne pratique médicale sur la dépression chez l’adulte a été rédigée en 2017 par Domus Medica et traduite par la SSMG. Les messages-clés concernant le traitement sont abordés ci-dessous. En cas de dépression légère (à modérée), il est recommandé de ne pas prescrire systématiquement des antidépresseurs et d’opter autant que possible pour des mesures générales non médicamenteuses et un soutien psychologique. En cas de dépression modérée à sévère, il est recommandé d’instaurer un traitement par un antidépresseur, associé à une psychothérapie. Dans ce cas, le choix se fera en première ligne entre un inhibiteur sélectif de la recapture de sérotonine (ISRS) et un antidépresseur tricyclique (ATC), en fonction des effets indésirables, des comorbidités, du risque suicidaire et des interactions médicamenteuses potentielles. En cas de surdosage, les ATC peuvent s’avérer, plus que les autres antidépresseurs, potentiellement fatals, et ils sont contre-indiqués lorsque le risque suicidaire est important. En cas de bonne réponse, il est recommandé de poursuivre le traitement antidépresseur pendant au moins 6 mois afin d’éviter les récidives. Chez les personnes âgées, une (légère) préférence est accordée à un ISRS, et l’on recommande de débuter le traitement par une faible dose. En présence d’une dépression accompagnée d’anxiété ou d’agitation, il peut être utile, dans certains cas exceptionnels, d’associer une benzodiazépine sur une courte période. Les antipsychotiques n’ont pas de place dans la prise en charge de la dépression en première ligne.

Une recommandation de bonne pratique médicale sur la dépression chez l’adulte a été rédigée en 2017 par Domus Medica et traduite par la SSMG. La recommandation commence par expliquer comment parvenir au diagnostic de dépression.

Le terme “dépression” renvoie dans cette directive à un large éventail de troubles de l’humeur à caractère dépressif avec lesquels les patients se présentent chez le médecin généraliste. Une distinction y est faite entre les "symptômes dépressifs", la "dépression légère (à modérée)" et la "dépression modérée à sévère". La sévérité de la dépression est évaluée en fonction du nombre et de la sévérité des symptômes et de leur impact sur les activités quotidiennes. Cette estimation étant en partie subjective, il est souvent difficile en pratique de faire une distinction claire entre ces différents niveaux de sévérité. Bien que cette directive propose un schéma pragmatique des différentes étapes pour parvenir au diagnostic, on peut admettre que les notions de dépression "légère", "modérée" et "sévère" sont assez conformes aux différentes formes de sévérité de la dépression majeure selon les critères de la DSM-5.

Outre l’explication pour parvenir au diagnostic de dépression, la recommandation aborde également un certain nombre de thèmes cliniques, entre autres comment évaluer le risque suicidaire, dans quels cas il est indiqué de réorienter le patient, et comment traiter la dépression, en s’intéressant également au suivi du patient, à la collaboration avec les aidants proches et le personnel soignant de deuxième ou troisième ligne, et à la dépression chez les personnes âgées. Nous abordons ici les messages clés concernant le traitement médicamenteux.

Dépression légère (à modérée)

La prise en charge de la dépression légère (à modérée) repose essentiellement sur des mesures générales non médicamenteuses. Un traitement par un antidépresseur n’est pas recommandé, certainement pas de façon systématique, et ce parce que les antidépresseurs ne se sont pas avérés plus actifs que le placebo dans la dépression légère. Les antidépresseurs ne seront envisagés qu’en cas de persistance des symptômes pendant plus de deux ans ou en cas d’échec des mesures non médicamenteuses. Une prise en charge psychologique (peu intensive) peut toutefois être envisagée.

  • Cette recommandation repose notamment sur les guidelines de NICE (National Institute for Health and care Excellence) et du NHG (Nederlands Huisartsen Genootschap) qui affirment que les antidépresseurs ont peu ou pas d’effet chez les patients présentant des symptômes peu sévères et qu’ils sont associés à des effets indésirables.
  • Les mesures générales non médicamenteuses sont: apporter un soutien au patient aussi bien qu’à sa famille et aux personnes concernées (p.ex. en les informant), être attentif à l’hygiène du sommeil, suivre activement le rythme journalier du patient et discuter avec lui comment structurer et planifier ses activités.

Dépression modérée à sévère

Chez les patients présentant une dépression modérée à sévère, et particulièrement en cas de dépression sévère, il est recommandé d’associer aux mesures générales non médicamenteuses un traitement par un antidépresseur et une psychothérapie (une thérapie comportementale cognitive étant le premier choix). L’utilisation des antidépresseurs s’accompagne d’un effet placebo important, mais dans les dépressions sévères, la différence entre l’effet lié à l’antidépresseur et l’effet placebo est claire.

  • La recommandation d’associer, en cas dépression modérée à sévère, un traitement médicamenteux à une psychothérapie, repose notamment sur les avis de NICE et du KCE qui concluent que l’effet obtenu est plus important avec l’association d’un traitement médicamenteux et d’une psychothérapie. Par contre, chez les personnes souffrant de dépression s’accompagnant de dysfonctionnements sociaux sévères, le NHG-Standaard conseille de commencer le traitement par un antidépresseur ou par une psychothérapie et de ne passer à la combinaison de ces deux traitements qu’en cas d’échec.
  • Les mesures générales non médicamenteuses sont: apporter un soutien au patient aussi bien qu’à sa famille et aux personnes concernées (p.ex. en les informant), être attentif à l’hygiène du sommeil, suivre activement le rythme journalier du patient et discuter avec lui comment structurer et planifier ses activités.
  • En ce qui concerne la psychothérapie, la thérapie comportementale cognitive est recommandée comme premier choix, mais d’autres options sont la thérapie de couple, la thérapie de résolution des problèmes (problem solving therapy) et la thérapie psychodynamique de courte durée.

Choix du traitement médicamenteux

Antidépresseurs

  • En termes d’efficacité, aucune différence claire n’a pu être mise en évidence entre les différents types d’antidépresseurs. Lorsqu’un antidépresseur est indiqué, le choix se fera en première ligne entre un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS) et un antidépresseur tricyclique (ATC), en fonction des effets indésirables potentiels, des éventuelles comorbidités et interactions médicamenteuses, et des antécédents du patient. Concernant les personnes âgées, voir plus loin.

  • ISRS: en termes d’efficacité, il n’y a pas suffisamment de preuves pour privilégier, en première ligne, un ISRS par rapport à un autre. Avec les ISRS, la dose initiale est en principe la même que la dose d’entretien habituelle, mais en débutant à dose plus faible, on limite les effets indésirables. [N.d.l.r.: en cas de réponse insuffisante, la dose d’entretien peut être augmentée, souvent en concertation avec le médecin de deuxième ligne.]. Les principaux effets indésirables des ISRS consistent en des troubles gastro-intestinaux, neurologiques etpsychiques (insomnie, anxiété, agitation, troubles du comportement, tremblements), une hyponatrémie (surtout en cas d’association avec des diurétiques), des saignements (principalement gastro-intestinaux et en cas d’association avec des antithrombotiques, des AINS ou de l’acide acétylsalicylique), des troubles sexuels et un syndrome sérotoninergique (qui survient presque exclusivement si l’ISRS est associé à un autre médicament sérotoninergique). La paroxétine a des effets anticholinergiques, le (es)citalopram peut provoquer un allongement de l’intervalle QT.
    Pour les effets indésirables des ISRS, nous renvoyons au Répertoire Commenté des Médicaments: voir chapitre 10.3. (effets indésirables communs à tous les antidépresseurs) et chapitre 10.3.1.1. (effets indésirables spécifiques aux ISRS).

  • ATC: en termes d’efficacité, il n’y a pas de preuves pour privilégier, en première ligne, un ATC par rapport à un autre. Un traitement avec un ATC doit être instauré progressivement, et la dose doit être augmentée jusqu’à atteindre la dose d’entretien. La dose d’entretien des ATC est plus faible dans la pratique ambulatoire que chez les patients hospitalisés. Les principaux effets indésirables des ATC consistent en une prise de poids, des effets anticholinergiques, des effets cardio-vasculaires (hypotension, tachycardie, arythmies: prudence chez les personnes âgées !) et des troubles sexuels. L’amitriptyline est sédative, alors que la nortriptyline est plutôt stimulante. En cas de surdosage, les ATC, plus que les ISRS et la plupart des autres antidépresseurs, provoquent certains problèmes, parfois accompagnés d’arythmies fatales: les ATC sont donc contre-indiqués en première ligne en présence d’un risque suicidaire important. Pour les effets indésirables des ATC, nous renvoyons au Répertoire Commenté des Médicaments: voir chapitre 10.3. (effets indésirables communs à tous les antidépresseurs) et chapitre 10.3.2.1. (effets indésirables spécifiques aux ATC).

  • Antidépresseurs appartenant à d’autres classes que les ISRS et les ATC (tels que les IMAO): selon la directive, ce ne sont pas des médicaments de premier choix pour la prise en charge de la dépression en première ligne ; ils ne présentent pas de bénéfice par rapport aux ISRS ou aux ATC, ou présentent davantage d’effets indésirables.

  • Une réponse au traitement antidépresseur est généralement observée 2 à 6 semaines après l’instauration du traitement.

  • Pour prévenir les récidives, il est recommandé, en cas de bonne réponse au traitement, de poursuivre le traitement médicamenteux pendant au moins 6 mois, et pendant au moins deux ans chez les patients présentant un risque élevé de récidives.

  • Vu le risque de symptômes de sevrage (troubles du sommeil, agitation, anxiété, …), il est préférable d’arrêter progressivement les antidépresseurs sur une période d’au moins 4 semaines. Le risque de symptômes de sevrage est d’autant plus élevé que la durée de traitement est longue. Il n’est pas clair si ce risque est plus élevé avec les substances à demi-vie courte (p.ex. la paroxétine). En cas de symptômes de sevrage sévères, il peut s’avérer nécessaire de reprendre le traitement antidépresseur ou d’augmenter à nouveau la dose.

Benzodiazépines

En cas de dépression accompagnée d’anxiété ou d’agitation, il peut être utile dans des cas exceptionnels, d’associer brièvement une benzodiazépine au début du traitement antidépresseur. Lorsqu’une benzodiazépine a été administrée pendant plus de deux semaines, il convient de l’arrêter progressivement vu le risque de sevrage en cas d’arrêt brutal. [Voir aussi 10.1.1. dans le Répertoire].

Antipsychotiques

Les antipsychotiques n’ont pas de place dans la prise en charge de la dépression en première ligne. L’association d’un antipsychotique avec un antidépresseur n’a qu’un effet positif limité et expose à un risque important d’effets indésirables. [Voir aussi 10.2. dans le Répertoire].

Dépression chez la personne âgée

Vu le risque élevé d’effets indésirables cardiaques et anticholinergiques associé aux ATC chez la personne âgée, un ISRS sera privilégié, sauf chez les patients atteints de la maladie de Parkinson ou présentant un risque élevé d’hémorragie gastro-intestinale, chez lesquels on privilégiera un ATC, de préférence la nortriptyline, dont les effets indésirables anticholinergiques et le risque d’hypotension orthostatique sont moins importants que l’amitriptyline. Chez les patients âgés présentant une comorbidité sévère ou âgés de plus de 80 ans, il est recommandé de débuter le traitement à dose réduite (moitié de la dose habituelle). Le délai nécessaire pour observer une réponse peut aller jusqu’à 12 semaines.

Une méta-analyse

Résumé

Une méta-analyse en réseau récente (The Lancet) a étudié l’efficacité et l’acceptabilité (évaluée en fonction du taux d’abandon) de 21 antidépresseurs dans le traitement de la dépression majeure chez l’adulte (major depressive disorder, dont le diagnostic s’appuie sur des critères diagnostiques standard). Il s’agissait de 2 ATC et 19 antidépresseurs appartenant aux autres classes. La méta-analyse confirme que dans les études randomisées menées auprès de patients atteints d’une dépression majeure sévère, les antidépresseurs sont plus efficaces que le placebo, et elle révèle des différences d’efficacité et d’acceptabilité d’un antidépresseur à l’autre. Comme dans des analyses précédentes, on remarquera un certain nombre de problèmes et de limites: d’un côté, la qualité et le niveau de preuve tout au plus moyens des études, d’un autre côté, les résultats peu extrapolables en raison de la conception des études (incluant principalement des patients atteints d’une dépression majeure sévère, études de courte durée, …). Les études randomisées disponibles et leurs méta-analyses laissent de nombreuses questions sans réponse en ce qui concerne la meilleure prise en charge d’un patient dans la pratique quotidienne.

Le 21 février 2018, The Lancet a publié en ligne les résultats d’une méta-analyse en réseau sur l’efficacité et l’acceptabilité (évaluée en fonction du taux d’abandon) de 21 antidépresseurs (2 ATC et 19 antidépresseurs appartenant aux autres classes) dans le traitement de la dépression majeure chez l’adulte.3,4

  • Une méta-analyse en réseau utilise principalement une méthode de comparaison indirecte. En l’absence d’études comparatives directes entre les différents antidépresseurs, ces médicaments sont comparés indirectement les uns aux autres à partir d’études ayant chacune évalué un antidépresseur en particulier par rapport à un placebo.
  • Dans les études incluses, le diagnostic de "dépression majeure" (major depressive disorder) a été posé sur base des critères diagnostiques standard (notamment le DSM-IV, DSM-5). La plupart des patients présentaient une dépression majeure “modérée à sévère”, le score de base moyen étant de 25,7 sur l’échelle de dépression de Hamilton (17 items) [n.d.l.r.: un score de 0 à 7 est considéré comme "non dépressif" , un score de 19 à 22 est considéré comme dépression "sévère", un score de ≥ 23 comme dépression "très sévère"]. La durée médiane de traitement était de 8 semaines.
  • Les investigateurs ont recherché toutes les études (publiées et non publiées) randomisées, réalisées en double aveugle et contrôlées (par placebo ou par un autre antidépresseur.
  • Les critères d’évaluation primaires étaient l’efficacité (définie par le taux de réponse, c.-à-d. le nombre total de patients dont le score symptomatique avait diminué d’au moins 50% sur une échelle de dépression standardisée) et l’acceptabilité (définie par le taux d’abandon, c.-à-d. le nombre de patients ayant arrêté le traitement pour n’importe quelle raison).

– La qualité des preuves obtenues à partir des résultats variait d’un antidépresseur à l’autre, de "très faible" à "moyenne" (système GRADE). Le risque de biais a été évalué comme étant "modéré à élevé" pour 82% des études.
– Il ressort de l’analyse des études contrôlées par placebo que l’efficacité (nombre de patients dont le score avait diminué d’au moins 50% sur une échelle de dépression) de tous les antidépresseurs était supérieure à celle du placebo; les auteurs considéraient généralement l’ampleur de l’effet comme étant "modeste". Le taux d’abandon pour quelque raison que ce soit, observé avec les nombreux antidépresseurs, ne différait pas par rapport au placebo; lorsque l’on considère uniquement le taux d’abandon en raison d’effets indésirables, tous les antidépresseurs donnaient de moins bons résultats que le placebo.
– Il ressort de l’analyse des études comparatives directes que l’efficacité et l’acceptabilité de certains antidépresseurs (tels que l’escitalopram, la mirtazapine, la paroxétine, l’agomélatine et la sertraline) étaient relativement plus grandes par rapport aux autres antidépresseurs. En revanche, l’efficacité et l’acceptabilité de la réboxétine, de la trazodone et de la fluvoxamine étaient relativement plus faibles par rapport aux autres antidépresseurs. Les auteurs de la méta-analyse ont toutefois observé peu de différences entre les différents antidépresseurs, probablement parce que les intervalles de confiance des paramètres d’efficacité étaient très larges.

Quelques commentaires2-6

– Il est frappant que dans cette méta-analyse, de bons résultats en termes d’efficacité et d’acceptabilité sont trouvés pour l’agomélatine, alors que plusieurs sources (indépendantes) affirment que le rapport bénéfice/risque de l’agomélatine est négatif [voir Folia de janvier 2016 et Minerva5,6.
– La méta-analyse en réseau révèle une fois encore que les études cliniques disponibles concernant les antidépresseurs chez l’adulte atteint de dépression majeure posent des problèmes. D’une part, la qualité des études est tout au plus moyenne. D’autre part, la conception des études limite la possibilité d’en extrapoler les résultats: il s’agit de populations incluant surtout  des patients atteints d’une forme sévère de dépression majeure, la durée des études est courte (bien plus courte que la durée de traitement de “plusieurs mois” qui est recommandée), et le critère d’évaluation est un score symptomatique sur une échelle de la dépression et non pas, par exemple, le fonctionnement social ou professionnel à plus long terme.
– Le problème du biais de publication avec les antidépresseurs est bien connu, les études dont le résultat est négatif ou non significatif étant moins souvent publiées. Même si la méta-analyse incluait également des études non publiées, il est probable que l’on n’ait pas retrouvé toutes les études non publiées.
– Un éditorial dans le BMJsignale que les conclusions de cette méta-analyse ne justifient pas l’incitation "plus de personnes doivent recevoir des antidépresseurs" dans  certains médias au Royaume-Uni. Les études incluses dans la méta-analyse ne se sont pas penchées sur la question de savoir qui doit précisément bénéficier d’un traitement médicamenteux : des directives telles que celles de Domus Medica s’efforcent de répondre à cette question. L’éditorial dans le BMJ attire l’attention sur l’importance (bien connue) de l’effet placebo en cas de dépression: lors d’un traitement par un antidépresseur, la plupart des patients se sentent mieux grâce à la rémission spontanée et à l’effet placebo et non pas en raison du traitement médicamenteux.
– Les analyses de ce type ne permettent pas de se prononcer sur l’effet pour un patient déterminé. Il est difficile d’évaluer l’impact clinique dans la pratique des différences observées dans ces analyses entre les antidépresseurs. Dans la pratique quotidienne, le choix de l’antidépresseur dépendra notamment aussi des facteurs propres au patient (comorbidités, antécédents), de l’expérience du médecin avec le médicament, des effets indésirables, des interactions et du coût de l’antidépresseur, mais aussi du risque en cas de surdosage. De telles analyses ne permettent pas non plus de se prononcer quant à la place des antidépresseurs dans la prise en charge globale du patient dépressif, dans laquelle les interventions psychosociales jouent également un rôle important. On remarquera surtout que les résultats de cette méta-analyse en réseau ne peuvent pas être extrapolés aux adultes présentant des formes moins sévères de dépression, chez lesquels le rôle des antidépresseurs est remis en question.

Conclusion

La directive commentée ici conseille de ne pas prescrire systématiquement des antidépresseurs en cas de “dépression légère (à modérée)” ; ils sont en revanche indiqués en cas de "dépression modérée à sévère", auxquels cas on choisira de préférence, en première ligne, un ISRS ou un ATC. Dans la dépression modérée à sévère, une place importante doit certainement être accordée au soutien psychologique. Dès l’instauration du traitement, il convient d’être attentif aux problèmes pouvant apparaître à l’arrêt du traitement. La méta-analyse ne contredit pas la recommandation d’instaurer systématiquement un antidépresseur en cas de formes sévères de dépression, mais elle confirme surtout que dans les études randomisées sur la dépression majeure sévère, les antidépresseurs s’avèrent supérieurs au placebo.

Note. La directive et la méta-analyse en réseau ne portent pas sur l’usage des antidépresseurs chez les enfants et les adolescents atteints de dépression. Pour aucun antidépresseur, l’efficacité chez l’enfant et l’adolescent n’est suffisamment prouvée, sauf peut-être pour la fluoxétine. Par ailleurs, un risque accru d’idées suicidaires et d’automutilation a été constaté chez les jeunes, surtout en début de traitement antidépresseur [voir Folia de novembre 2015].
 

Sources spécifiques

1 Declercq T, Habraken H, van den Ameele H, Callens J, De Lepeleire J en Cloetens H. Depressie bij volwassenen. Richtlijn van Domus Medica, via https://www.domusmedica.be/documentatie/richtlijnen/overzicht/depressie.html.
2 De aanbeveling is ondersteund door SSMG, en beschikbaar in het Frans (“La dépression chez l’adulte) via http://www.ssmg.be/publications/recommandations-de-bonne-pratique
3 Cipriani A, Furukawa TA, Salanti G, Chaimani A, Atkinson LZ et al. Comparative efficacy and acceptability of 21 antidepressant drugs for the acute treatment of adults with major depressive disorder: a systematic review and network meta-analysis. The Lancet 2018;391:1357-66 (online 21 février 2018) (doi: 10.1016/S0140-6736(17)32802-7)

4 Parikh SV en Kennedy SH. More data, more answers: picking the optimal antidepressant. The Lancet 2018;391:1333-4 (online 21 februari 2018) (doi: 10.1016/S0140-6736(18)30421-5)
5 Habraken H. Agomelatine... (editoriaal) Minerva 2012;11:105
Habraken H. Wat is het antidepressieve effect van agomelatine? (bref commentaire) Minerva 15/12/2014
7 McCormack J en Korownyk. Effectiveness of antidepressants. Editorials. BMJ 2018;360:k1073 (doi:10.1136/bmj.k1073)