La sibutramine dans l’obésité


Abstract

La sibutramine est une substance anorexigène, chimiquement apparentée aux amphétamines, qui inhibe la recapture de la noradrénaline et de la sérotonine. La place de la sibutramine dans la prise en charge de l’obésité est compromise par une reprise de poids importante à l’arrêt du traitement et par le fait que la durée maximale de traitement mentionnée dans la notice est de maximum un an. Ce traitement présente en outre des risques, notamment d’élévation de la tension artérielle.

La sibutramine est commercialisée depuis peu en complément d’un programme de contrôle pondéral. Elle est proposée après échec de celui-ci seul, chez les personnes suivantes.

  • Les personnes obèses (Body Mass Index* ou B.M.I. minimal de 30 kg/m2).
  • Les personnes présentant une surcharge pondérale (B.M.I. minimal de 27 kg/m2), en présence de facteurs de risque tels un diabète de type 2.

La sibutramine, chimiquement apparentée aux amphétamines, inhibe la recapture tant de la sérotonine que de la noradrénaline. A l’instar des anorexigènes classiques, la sibutramine produit une sensation de satiété.

* Le Body Mass Index (BMI) est le rapport entre le poids et le carré de la taille (exprimé en kg/m2).


Efficacité

Plusieurs études randomisées en double aveugle d’une durée de 6 à 12 mois ont comparé la sibutramine et un placebo chez des personnes obèses ou présentant une surcharge pondérale (dans ce cas, en présence de facteurs de risque) sous régime hypocalorique. Dans ces études, la perte de poids observée avec la sibutramine, à une dose de 10 à 30 mg par jour, était supérieure de 3 à 9 kg par rapport au placebo [n.d.l.r.: la posologie recommandée dans la notice est de 10 mg par jour, à augmenter éventuellement jusqu’à 15 mg par jour].

Etant donné l’absence d’études sur l’effet des médicaments contre l’obésité sur la morbidité et la mortalité cardio-vasculaires, il a été proposé dans la "Note for Guidance on Clinical Investigation of Drugs Used in Weight Control&quot (CPMP/EWP/281/96) de l’Agence Européenne pour l’Evaluation des Médicaments (European Agency for the Evaluation of Medicinal Products ou EMEA) de suivre dans des études contrôlées par placebo le pourcentage de patients qui ont perdu au moins 10% de leur poids par rapport à la valeur de départ; on estime en effet qu’une telle perte de poids est généralement associée à un effet favorable sur certains facteurs de risque cardio-vasculaires. Que peut-on observer à ce sujet dans les différentes études sur la sibutramine (10 mg ou plus par jour) ayant duré au moins un an? Avec la sibutramine, 19 à 56% de patients en plus ont perdu au moins 10% de leur poids par rapport au placebo. Cette différence était statistiquement significative dans plusieurs études.

Deux études ont également suivi l’évolution du poids à l’arrêt du traitement.

  • Dans une étude, l’augmentation de poids a été évaluée un mois après l’arrêt du traitement. Celle-ci était de 1,1 à 1,3 kg chez les patients ayant pris de la sibutramine, par rapport à 0,4 kg chez les patients sous placebo.
  • Dans l’autre étude, l’augmentation de poids a été évaluée 3 mois après l’arrêt du traitement. Celle-ci était de 4,3 kg chez les patients qui avaient pris de la sibutramine, et de 2,3 kg chez les patients sous placebo.

Effets indésirables et interactions

Dans les études cliniques, les effets indésirables le plus fréquemment rapportés ont été de la constipation, une sécheresse de la bouche, de l’insomnie, des céphalées, des vertiges, des paresthésies et de la nervosité. Dans plusieurs études, une élévation de la tension artérielle et de la fréquence cardiaque a été observée. A ce sujet, une analyse de deux études sur la sibutramine (5 à 20 mg par jour) a permis de faire les constatations suivantes.

  • Tant chez les patients auparavant normotendus que ceux qui étaient auparavant hypertendus, une augmentation de la pression diastolique de 10 mmHg ou plus par rapport aux valeurs de base a été observée chez 15 à 22% des patients traités par la sibutramine (5 à 20 mg par jour) versus 7% chez les patients sous placebo.
  • La fréquence cardiaque augmentait d’au moins 10 battements par minute chez 16 à 37% des patients traités par la sibutramine versus 12% chez les patients sous placebo.

Des valvulopathies et une hypertension pulmonaire ont été décrites avec les anorexigènes* [voir Folia mai 2000 , de novembre1999 , de mai 1999 et d’ octobre 1997]: ces effets indésirables n’ont pas été constatés jusqu’à présent avec la sibutramine. Dans le plupart des études, une diminution statistiquement significative des triglycérides a été observée avec la sibutramine, et dans certaines études, aussi une élévation du HDL-cholestérol; cet effet n’était cependant pas associé à une diminution statistiquement significative du cholestérol total et du LDL-cholestérol. Etant donné que la structure de la sibutramine est chimiquement apparentée aux amphétamines, on peut se demander bien entendu si elle entraîne les mêmes effets indésirables que les amphétamines tels stimulation et dépendance: les quelques études à ce sujet ne semblent pas indiquer que cela soit un problème.

La sibutramine est métabolisée lors du premier passage hépatique par le CYP3A4 en deux métabolites actifs. La prudence s’impose donc en cas de prise concomitante de sibutramine et de médicaments inhibant le CYP3A4, tels la ciclosporine, le kétoconazole, l’itraconazole, l’érythromycine. En outre, l’éventualité d’un syndrome sérotoninergique [n.d.l.r.: caractérisé e.a. par de la fièvre, de l’agitation, des myoclonies et plus rarement, par des convulsions, de l’arythmie ventriculaire et une hyperthermie importante; voir aussi Folia janvier 1996ne peut être exclue lors de l’utilisation concomitante de sibutramine et de médicaments qui augmentent le taux de sérotonine dans le cerveau (par ex. les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, les triptans, le dextrométorphane).


Place de la sibutramine dans la prise en charge de l’obésité

La meilleure façon de perdre du poids est d’associer un régime faiblement hypocalorique (diminution de 500 à 600 kcal/jour) à une activité physique modérée et/ou un traitement comportemental [voir aussi Folia de juin 1999 ]. Un traitement médicamenteux (par ex. par la sibutramine ou l’orlistat) ne peut être envisagé qu’en cas d’échec de ces mesures chez des patients obèses ou présentant une surcharge pondérale associée à des facteurs de risque [voir aussi Folia de juin 1999 et de Folia décembre 1998]. L’effet de ces médicaments sur la morbidité et la mortalité n’est pas connu, et il convient en outre de tenir compte de leur coût.

  • Sibutramine. Un peu de pression artérielle en plus pour quelques kilos en moins. 21 : 405-412(2001)
  • Sibutramine. Eénmaal daags, vederlicht ? Pharma Selecta 17 : 33-36(2001)

Noms de spécialités


Orlistat: Xenical

Sibutramine: Réductil

Les auteurs des articles dans La Revue Prescrire et dans Pharma Selecta relativisent fort la place de la sibutramine dans la prise en charge de l’obésité étant donné son faible intérêt et ses risques, en particulier l’élévation de la tension artérielle. Dans l’article "L’orlistat dans la prise en charge de l’obésité&quot publié dans les Folia de décembre 1998, il est écrit que pour l’orlistat aussi, la place dans la prise en charge de l’obésité n’est pas claire.